Usul mène une réflexion sur le « gaming », une pratique qu’il juge trop souvent dénigrée, dans des chroniques hebdomadaires bourrées d’humour diffusées sur le site jeuxvideo.com
Le code « 3615 Usul« s’affiche sur l’écran d’un minitel aux côtés du visage d’un jeune homme aux cheveux mi-longs et lunettes rondes, sur fond de musique lounge. Le générique est à l’image des vidéos qu’il introduit : drolatique.
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Tous les dimanche, « Usul » – qui refuse de dévoiler son nom – on sait juste qu’il a 26 ans, publie sa chronique filmée « 3615 Usul » sur le site jeuxvideo.com. Il y disserte, pipe à la main, sur un thème ayant trait aux jeux vidéo, comme « l’addiction« , « les chatons« , ou encore « le score« , s’amusant avec les stéréotypes en vigueur sur les gamers. Ainsi, dans « Les joueuses », le chroniqueur brosse le portrait de la gameuse, étudiant son comportement comme s’il s’agissait d’un spécimen rare, une espèce en voie de disparition:
« Il y a deux sortes de joueurs : ceux qui ont une prostate et les autres. Les autres ce sont les joueuses. Espèce rare et délicate, la joueuse se reconnait au cri particulier qu’elle émet lorsqu’on la met en présence d’une console de jeu : [une jeune femme, manette en main, apparaît à l’écran] « putain de ta race de boss de merde mais crèèèève. »
http://www.youtube.com/watch?v=jgVjWL0rsG8
Dans chacune de ses chroniques, Usul manie un style ampoulé, une emphase toute littéraire pour mieux singer un professeur poussiéreux (la preuve, il utilise un minitel), utilisant la langue comme scalpel pour autopsier son objet d’étude : le gaming.
« Usul est devenu une marque »
Tout commence en 2008 lorsque Usul poste ses premières vidéos sur Dailymotion avec pour objectif de partager sa passion pour les jeux vidéo, auxquels il joue depuis l’âge de trois ans. L’humour s’y fait au départ discret, avant d’y tenir le beau rôle à partir de l’été 2011. En octobre de la même année, ses chroniques tapent dans l’œil du site jeuxvideo.com, qui décide d’en faire un rendez-vous hebdomadaire.
Usul et Dorian, son acolyte, sont rémunérés à la chronique, ce qui leur permet de vivre « chichement » dans une grande collocation en Bretagne, qu’ils partagent avec certains membres du site participatif Nesblog dont Realmyop, leur réalisateur. Car Usul est désormais un projet collectif, comme l’explique son créateur :
« Au début j’étais seul à écrire et filmer. Mais maintenant Usul est devenu une marque. »
Usul est toujours le seul à écrire les textes de ses chroniques, dont les thèmes naissent le plus souvent lors de séances de brainstorming en duo avec Dorian, qui joue également dans les vidéos. Parfois, ce sont les internautes eux-mêmes qui sont à l’origine des chroniques :
« J’ai fait un 3615 sur l’homosexualité suite à un message que j’avais reçu dans lequel un internaute me disait que certains homosexuels se sentent oppressés dans la communauté des gamers, où les insultes homophobes sont courantes. »
Autre exemple : le 3615 intitulé La virilité, qui fait suite à la polémique entourant un article sur le dernier volet du jeu Lara Croft, publié dans un hors-série du magazine spécialisé Joystick le 3 juillet dernier. L’auteur s’y enthousiasmait d’une tentative de viol sur l’héroïne, déclenchant l’ire des féministes, dont Mar-Lard (qui ne souhaite pas dévoiler son nom). La féministe a exprimé sa colère dans un article publié en août dernier sur le blog Genre! « L’article a été mal reçu par les gamers. Moi je l’ai trouvé intéressant, donc j’ai contacté son auteur et on a essayé de voir si le message passait mieux si c’était un mec qui le diffusait. Effectivement c’est mieux passé ! » explique Usul, choqué.
http://www.youtube.com/watch?v=W9S3Zp0qlAs&feature=related
Le jeu vidéo : une discipline artistique ?
L’humour pour véhiculer un message. La recette n’est pas nouvelle mais a le mérite d’être terriblement efficace. L’objectif d’Usul, qui rejette la culture geek du « repli sur soi« , est d’intéresser le grand public au jeu vidéo, qu’il considère comme un art à part entière, au même titre que le cinéma :
« Au départ, le ciné était destiné à amuser les enfants et les femmes, c’était tenu par des forains. On sait que le jeu vidéo aura la même destinée que le cinéma. »
Il poursuit :
« Le jeu vidéo n’est pas vu comme quelque chose de sérieux. Pourtant, il y a des créateurs, des gens qui réfléchissent autour du jeu. Il faut donc rassurer le grand public en lui montrant qu’on a d’autres références que celles du jeu vidéo. »
D’où l’accumulation de clins d’œil cinématographiques (Orange mécanique, Requiem For a Dream…) et la présence de portraits de BHL et Jacques Attali accrochés au mur dans ses vidéos. Usul, qui est passé, entre autres, par les Beaux Arts, explique : « On essaye d’aborder de nouvelles problématiques comme la place du jeu vidéo dans le domaine de l’art, en faisant référence aux autres disciplines« .
Le chroniqueur ne s’arrête pas là. Armé d’une bonne dose d’humour, il décortique l’univers du jeu vidéo pour en souligner l’aspect poétique dans La poésie :
http://www.youtube.com/watch?v=wYlu8NJzo8c
Ou attirer notre attention sur le placement de produit, dans La pub :
http://www.youtube.com/watch?v=hc6VTf8hd7g
Ce mélange d’humour et de réflexion fait mouche, pour preuve les quelques 230 000 vues qu’atteignent en moyenne ses chroniques. Un succès qui conforte le chroniqueur dans l’idée qu’Internet est le médium idéal pour diffuser ses vidéos, dont le format court (leur durée n’excède pas huit minutes) garanti la viralité.
Pourtant, loin de vouloir devenir le Norman du jeu vidéo, Usul envisage de s’orienter vers le documentaire ou la fiction (toujours en lien avec le jeu vidéo). Avec sa collection de pseudos – qui lui garantissent de ne jamais avoir à révéler son véritable patronyme – ce Breton, qui a tendance à « se disperser » par excès de curiosité, risque de vivre plusieurs vies en une… un peu comme dans un jeu vidéo quoi.
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