Michel Houellebecq explique comment il a conçu ce numéro des Inrockuptibles dont il est rédacteur en chef.
Cela fait vingt ans, presque jour pour jour, que j’ai cessé toute activité professionnelle ; qu’est-ce que j’ai bien pu foutre, pendant toutes ces années ? De temps en temps, c’est vrai, j’ai écrit des livres. Mais je n’ai guère “pris part à la vie de la cité”, je ne suis pas tellement allé au cinéma non plus, et en musique je n’ai rien suivi.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Ces derniers temps, j’ai un peu rattrapé mon retard dans le domaine des arts plastiques, enfin je suis encore loin du compte. Pour l’essentiel, j’aurai passé vingt ans à bouquiner.
La critique fait ce qu’elle peut
Ma première réaction lorsqu’on m’a proposé d’être rédacteur en chef invité a donc été de rechercher, dans ma bibliothèque, les curiosités. A savoir les livres qui m’étaient apparus d’une manière ou d’une autre beaux, intéressants, remarquables, mais dont la presse n’avait pas suffisamment parlé au moment de leur sortie. J’en ai facilement trouvé une vingtaine, ce qui ne doit pas être considéré comme une critique de la critique. La critique fait ce qu’elle peut.
Tout finit par s’arranger, tôt ou tard ; mais quand l’auteur est déjà mort, évidemment, c’est un peu bête. Je me suis donc limité aux auteurs raisonnablement vivants, et vous ne trouverez rien dans ce numéro sur Somerset Maugham, ni sur Theodor Fontane ; ça aurait pu être bien, mais ce n’était pas le lieu ; j’étais dans un magazine, pas dans un livre.
Il n’y a pas que la littérature dans la vie
J’aime bien procéder par ramifications, pendant toute mon adolescence j’ai lu comme ça (et je continue, d’ailleurs) : j’ai aimé Machin, je lis sur une quatrième de couverture qu’Untel a influencé Machin, j’achète Untel. Ce n’est pas très structuré, comme méthode, mais ça marche.
Cela dit, il n’y a pas que la littérature dans la vie, c’est peut-être regrettable mais c’est ainsi. Quand Nelly m’a écrit : “En rock, j’ai entendu dire que t’aimais bien Led Zep…”, j’ai compris que ça n’allait pas le faire. J’aime bien Black Sabbath et Pink Floyd, aussi. Et, en cinéma, j’adore Taxi Driver.
En 1976, j’aurais pu réaliser un excellent numéro. Aujourd’hui, je suis assez content de passer la parole à Mirwais et Guillaume Nicloux. Michel Houellebecq
{"type":"Banniere-Basse"}