Buy art makes free, Salomé, chorégraphie de Marco Berrettini.
« Buy art makes free, Salomé » ou « Acheter l’art libère, Salomé », une transformation de Arbeit macht frei (« le travail libère »), sombre slogan gravé sur les portails des camps de concentration. Le titre du spectacle donne ainsi une indication du genre d’humour tordu qui court le long des pièces de Marco Berrettini, cet homme-qui-serait-chorégraphe sans nationalité fixe. Spectacle-parodie débile à la triple dose de kitsch ? Certes, la ridiculisation de la danse contemporaine (d’où les morceaux sélectionnés de Negativland, équivalent musico-bruitiste californien de l’insolence berrettinienne), la négation du spectacle au sens spectaculaire, et le balancement pêle-mêle d’un ragoût, pardon, risotto iconoclaste, sont les ingrédients essentiels qui feraient de Berrettini un spécialiste de la sous-culture. Ce serait pourtant un tort de le reléguer sous la simpliste classification de l’underground, car Berrettini est l’un de ces artistes qui prend le temps de se forger – étape trop souvent grillée par beaucoup, tout à la hâte de cracher les uns après les autres des spectacles « à thème » ou « en béton ». Rigolade et bizarrerie laissent entrevoir aussi angoisse et agonie. Berrettini porte sa croix, sur la scène comme à la ville, se posant la question, la véritable énigme qui ronge tout artiste légitimement contemporain: et maintenant..? mais après..? Malgré ses efforts pour le cacher, Berrettini adore danser. Cela se voit, même sil y a de moins en moins de danse dans ses spectacles qui essaient de résoudre cette lutte pour la place et l’utilité d' »une des dernières façons de se servir de nos pieds ». Buy art makes free, Salomé démarre sur une fausse présentation d’une pièce chorégraphique… pour radio (!) et, comme si cela ne suffisait pas, les trois interprètes réussissent tous, en l’espace de deux temps, trois mouvements, à quitter la scène pour continuer dans le foyer du théâtre, micro à l’appui. Mais l’insolence libère, et la beauté-montruosité du duo qui achève la pièce caractérise l’ambiguïté de l’artiste et de son spectacle parfaitement imparfait.
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Jeremiah Cullinane
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