Plagier n’est pas (toujours) gagner. Entre l’ersatz de God of War et l’original, le combat tourne court.
Cet article devait faire l’éloge du plagiat. Ou, du moins, souligner l’intérêt que présentent pour les joueurs les emprunts de motifs et la circulation des concepts. Parce qu’une grande idée ne devient pas subitement mauvaise quand quelqu’un d’autre s’en empare. Parce que l’imitation débouche parfois sur une passionnante réinterprétation. Et parce que la copie permet souvent de libérer une invention ludique de l’exclusivité à telle ou telle machine.
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Combien d’heures les premiers gamers ont-ils passé sur des simili-Space Invaders, des Donkey Kong singés, des Pac-Man génétiquement modifiés ? L’un des clones les plus fameux de l’histoire du jeu vidéo vient d’ailleurs de refaire surface. En 1987, The Great Giana Sisters était retiré de la vente sous la pression de Nintendo, qui y avait reconnu sans mal un décalque de son Super Mario Bros. Modernisé, le jeu est sorti sur iPhone, et c’est un régal parce qu’au fond c’est toujours Mario.
Le cas Sonic & Sega All-Stars Racing est proche : si ses courses effrénées mettent en scène les personnages stars de Sega (Sonic, Alex Kidd, Ryo Hazuki…), il n’est en réalité qu’une copie de l’excellent Mario Kart. Mais une copie très réussie, et disponible sur des consoles privées de l’original.
Dante’s Inferno aurait dû s’inscrire dans cette tendance. Car si la dernière création du studio Visceral Games (Dead Space) cherche à se faire passer pour une adaptation de La Divine Comédie de Dante Alighieri (dont l’esprit n’est d’ailleurs pas scandaleusement trahi), elle frappe surtout par sa reprise littérale du système de jeu et du style graphique de God of War, saga ultraviolente éditée par Sony, qui la réserve logiquement à ses propres consoles.
Mais, occupés à en transposer le gameplay dans l’enfer du poète italien, les auteurs de Dante’s Inferno sont passés à côté du principe de surenchère qui sous-tend God of War depuis son premier épisode. Sans cette obsession du “toujours plus” (de gigantisme, de gore, d’audaces cinématiques), ce dernier ne serait qu’une suite de combats routiniers contre des monstres mythologiques.
Si God of War cesse d’accélérer, il ralentit, puis il tombe. Et Dante’s Inferno a tout d’un God of War qui aurait oublié d’avancer. Paru quelques semaines après lui, le troisième volet de la série Sony ne commet pas cette erreur. L’impitoyable Spartiate Kratos y affronte toujours les dieux de l’Olympe, hurlant sa haine de Zeus entre deux décapitations de Gorgones.
Si l’on s’interrompait pour y penser, tout cela se révélerait grotesque, mais l’énergie déployée par God of War III est telle que l’on ne s’arrête justement pas, emporté par sa logique de (très grand) spectacle assisté par ordinateur. Pas novateur mais furieusement dynamique, le jeu force l’adhésion du joueur le plus réfractaire aux envolées barbares. Et sort sans conteste grandi de la confrontation avec sa copie.
Photo : God of War III
DANTE’S INFERNO Sur PS3 et Xbox 360 (Visceral Games/EA, environ 70€)
GOD OFWAR III Sur PS3 (Sony, environ 70€)
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