Compte-rendu de mauvaise foi d’une rencontre sur le téléphone portable et les femmes autour de mini-croissants.
Dans un chic restaurant du 16e arrondissement décoré par Philippe Starck, des journalistes de tous horizons (féminins, Philosophie Magazine, Pleine Vie entre bien d’autres) se sont retrouvés ce mardi à l’invitation d’une talentueuse start-up de l’Internet contemporain, Tiki’labs. Les salades de fruits en verrine et les pots de confiture individuels témoignaient du luxe de la cérémonie. Tout était très bien rangé.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
On doit parler du rapport des femmes à leur smartphone (expression visant à désigner non pas des téléphones qui réfléchissent sans toi mais ceux qui font d’autres choses que téléphoner). Avant de commencer, les invités se goinfrent poliment.
L’ambiance n’est pas terrible parce que les gens ne se connaissent pas, mais dans ce genre de situation on trouve toujours quelqu’un pour mettre à l’aise. Là c’est un critique gastronomique qui raconte ses exploits : une fois, il a goûté à douze entrées et une dizaine de plats dans le même repas.
NKM, sainte patronne
Le responsable marketing de Tiki’labs, un grand avec un je-ne-sais-quoi de Lambert Wilson, marche en crabe vers les invités munis de carnets. Il constate sans méchanceté le léger retard numérique féminin. “Vous ne faisiez rien avant l’iPhone”, résume-t-il.
Le petit-déj se déroule “sous le patronage de Nathalie Kosciusko-Morizet”, expliquait le communiqué de presse. La start-up organisatrice, qui travaille également sur un contrat passé avec l’Etat, entretient de bonnes relations avec la secrétaire d’Etat. Malheureusement NKM n’était pas présente, ayant sans doute un agenda de ministre.
Quand tout le monde a bien mangé, on passe dans une autre salle, ornée d’une magnifique fausse bibliothèque géante en papier peint. Au début j’ai cru que c’était une vraie, puis un rayon de soleil révélateur m’a apporté la lumière.
En fait de discussion sur les usages téléphoniques féminins, on est tombés dans un abîme puissant. Chantal Jannet, membre du collège de l’Hadopi et de l’Union Féminine Civique et Sociale, rappelle que “dans les années 1980, un ordinateur de bureau était inesthétique pour les femmes, ça ne les intéressait pas.”
Elle en déduit que “dès qu’il s’agit de technique, les femmes sont un peu réticentes”. Aujourd’hui, Chantal Jannet se réjouit de la prise en main toute féminine des smart phones : :”Je gère ma garde-robe avec, si je dois sortir, je sais ce que j’ai dans les rouges”. Et surtout : “Je ne me perds plus.”
Un investisseur / guetteur de talents, Jacques Birol, a la métaphore virile : “Les portables, dans le temps, c’était des objets militaires. Aujourd’hui on passe de la poudre au poudrier, de la frappe à la caresse”. Et surtout, sim-pli-ci-té d’utilisation. Pas parce que les nanas sont des demeurées, non non. “Parce qu’elles font beaucoup plus de trucs que les mecs. Par définition, les femmes sont multitâches.” Nous ne saurons pas si c’est génétique ou contagieux.
Internet (tuyau) = masculin
Le PDG de Tiki Labs, Xavier Paulik, fait le bilan des connaissances à travers diverses études. Apparemment, les femmes “envoient plus de messages que les hommes, se connectent moins à l’internet mobile, visitent moins les réseaux sociaux.”
Elles demeurent toutefois le coeur de cible des marchands de toute sorte, avec leurs supposées caractéristiques : elles “comparent moins les prix mais achètent plus” et alors que “les hommes parlent boulot, les femmes s’expriment”. Personne ne lole.
C’est le moment de la présentation Powerpoint avec un slide de ouf, définitif, sur une grande page blanche :
Internet (tuyau) = masculin
Web (contenu) = féminin
Une jeune femme, jolie comme dans la Roue de la fortune mais beaucoup moins vulgaire, démontre ensuite l’utilité du produit proposé à travers des “scénarios de la journée d’une femme”.
La femme, par exemple, “va sur Elle, lire les conseils beauté”. Ensuite elle rejoint sa bande de copines, avec qui elle regarde Facebook sur son téléphone. “Toutes ensemble, elles commentent les derniers potins. Puis, elles parlent cuisine”. Pendant ce temps dans la salle du restaurant, de jeunes femmes débarrassent la table du petit-déjeuner.
{"type":"Banniere-Basse"}