Face au Pentagone, WikiLeaks semble perdre ses soutiens parmi les humanitaires, qui lui reprochent de mettre en danger des civils afghans après la révélation de documents confidentiels. Amnesty International dément pourtant avoir signé la lettre adressée au fondateur du site, Julian Assange.
Ils étaient de bons alliés et soutenaient jusque-là WikiLeaks face au Pentagone. Désormais, les humanitaires élèvent eux aussi la voix contre le site Internet qui a publié, dimanche 25 juillet, plus de 70 000 documents de guerre confidentiels sur la situation en Afghanistan entre 2004 et 2009.
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Depuis mardi, les relations entre WikiLeaks et les associations de défense des droits de l’homme présentes en Afghanistan semblent ainsi se retourner. Le Wall Street Journal, repris par Le Monde et l’AFP, annonçait en effet l’envoi à Julian Assange, fondateur de WikiLeaks, d’une lettre signée par cinq associations (dont Amnesty International) qui dénonçaient les risques que fait courir le site en publiant les noms d’Afghans qui ont collaboré avec la coalition occidentale.
Mais dans ce petit jeu, les organisations prennent leurs précautions. Contacté par les Inrocks, Amnesty International déclare n’avoir aucun commentaire et affirme « n’avoir signé aucune lettre formelle » :
« Nous ne sommes pas signataires de cette lettre. Nous avons simplement un échange de mails avec WikiLeaks. »
Des alliés d’hier
Dans un communiqué du 26 juillet, Amnesty International se félicitait que « les documents divulgés [aillent] dans le sens des conclusions de l’enquête d’Amnesty International ». Sam Zarifi, directeur du programme Asie-Pacifique d’Amnesty espérait alors que « ces fuites galvanisent le commandement de l’Otan et l’incitent à renforcer la protection des civils ».
Pour l’association, ces documents montrent notamment que « le commandement de l’Otan ne savait pas exactement ce qui se passait sur le terrain ». Les documents apportent par ailleurs de nombreuses informations concernant une unité secrète, la « Task Force 373 ».
Amnesty avait également soutenu WikiLeaks lors de la diffusion d’une vidéo intitulée « meurtre collatéral », montrant un hélicoptère américain qui ouvrait le feu sur des civil en Irak.
Un isolement de WikiLeaks dans la confusion
Les relations entre les associations humanitaires et WikiLeaks se sont par la suite gâtées. D’après les ONG, les informations publiées par le site contiennent les noms de nombreux Afghans collaborant avec la coalition occidentale.
Pour sa défense, Julian Assange affirme d’abord avoir demandé au Pentagone de supprimer lui-même les références aux informateurs avant la publication des documents. Une version contredite par le Pentagone, avant que le fondateur de WikiLeaks ne nuance, en expliquant n’avoir contacté les militaires américains que par l’intermédiaire du New York Times.
Les craintes des associations? Qu’ils ne soient victimes de représailles de la part des Talibans. Ces derniers ont en effet affirmé utiliser les document rendus publics par WikiLeaks pour retrouver et punir les informateurs. Voilà donc l’objet de la lettre transmise à Julian Assange. Les associations y demandent l’effacement des noms des civils afghans cités dans les documents.
Mais le démenti d’Amnesty International montre à quel point le conflit est délicat. L’organisation négocierait avec WikiLeaks pour fournir une assistance dans l’effacement des noms. Elle pourrait fournir des ressources pour analyser les archives en question. Mais la réaction de Julian Assange laisse perplexe:
« Je suis très occupé et je n’ai pas de temps à perdre avec des gens qui ne pensent qu’à couvrir leurs fesses. Si Amnesty ne fait rien, je publierai un communiqué pour dire qu’ils refusent de nous aider. »
Les discussions sont donc loin d’être terminées.
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