Uptight (Motown/Universal)Lorsqu’il signe Uptight en 1966, le “petit” Stevie Wonder n’a que 16 ans (!), mais sent bien confusément que sa carrière d’enfant prodige menée avec brio depuis déjà quatre longues années, touche à sa fin. C’est sans doute pourquoi cet album de transition apparaît avec le recul à la fois comme l’apogée de sa “première manière” […]
Uptight (Motown/Universal)
Lorsqu’il signe Uptight en 1966, le « petit » Stevie Wonder n’a que 16 ans (!), mais sent bien confusément que sa carrière d’enfant prodige menée avec brio depuis déjà quatre longues années, touche à sa fin. C’est sans doute pourquoi cet album de transition apparaît avec le recul à la fois comme l’apogée de sa « première manière » et l’album où transparaissent les premières manifestations d’un talent singulier et parfaitement hors-norme. Sans rien révolutionner de façon fondamentale, le musicien s’émancipe avec finesse de l’influence du parrain de la soul, Ray Charles, et oriente son répertoire tant dans sa thématique (avec notamment la reprise de l’hymne contestataire de Dylan, Blowin’ the wind), que dans sa couleur générale, aux limites extrêmes des canons esthétiques du label Motown… L’apothéose d’un style et l’amorce subtile d’une première maturité…
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Music of my mind (Motown/Universal)
Avec son titre-manifeste, Music of my mind est sans nul doute l’album de la rupture dans la carrière de Stevie Wonder, celui où, pour la première fois, le musicien prend résolument la parole et fait entendre la musique qu’il a réellement « en tête »… Nous sommes en 1972, la musique noire est en pleine révolution sociale et esthétique : James Brown, Marvin Gaye, Isaac Hayes enregistrent chef-d’ uvres sur chef-d’ uvres – Wonder qui arrive à la fin de son contrat avec Motown le renégocie dans le sens d’une nouvelle autonomie créatrice. Il compose, produit, arrange la totalité des chansons du disque, s’enferme en studio pour jouer seul de la plupart des instruments et enregistre une oeuvre ambitieuse, pensée, construite, rompant définitivement cette fois avec la logique purement commerciale et le savoir-faire roublard qui présidaient jusqu’alors à la conception de ses disques. Une authentique déclaration d’indépendance.
Talking book (Motown/Universal)
Enregistré la même année que le programmatique Music of my mind, Talking book vient en quelque sorte, dans la foulée, réaliser somptueusement toutes les intuitions et promesses ébauchées quelques mois plus tôt. Fidèle à sa nouvelle méthode Wonder, en véritable démiurge, contrôle toutes les étapes de la conception et de la réalisation du disque, attentif aux moindres détails, perfectionniste jusqu’à la névrose. Le résultat est à la mesure de l’engagement : une musique à la fois mature et spontanée, sensuelle et directe derrière la sophistication des arrangements, gorgée de mélodies exceptionnelles dont deux deviendront des hits interplanétaires : Superstition et You are the sunshine of my life… Le premier chef-d’ uvre indiscutable de Stevie Wonder, annonciateur d’une longue série.
Innervisions(Motown/Universal)
A peine un an plus tard Stevie Wonder signe avec Innervisions son disque le plus directement engagé politiquement, mettant clairement son art au service du combat identitaire de la communauté noire américaine… Un funk forcené, des arrangements raffinés et somptueusement minimalistes, des mélodies capiteuses et ensorcelantes, au service d’un discours utopique et militant, branché sur la réalité sociale. Stevie Wonder oublie là définitivement les sucreries futiles et rejoint le Marvin Gaye de What’s going on à l’avant-garde de la conscience afro-américaine. Un disque-phare de la musique populaire noire.
Songs in the key of life (Motown/Universal)
Il faudra trois longues années à Stevie Wonder pour concevoir et réaliser ce qui demeure à ce jour non seulement son plus grand disque mais l’un des quelques monuments incontournables de l’histoire de la musique noire, tous genres confondus. Plus le temps passe plus Songs in the key of life apparaît comme une somme indépassable, une oeuvre synthétique géniale d’une ambition démesurée brassant tous les styles (jazz, funk, pop, ballades soul) avec un bonheur expressif constant. Chaque chanson est un hit potentiel (Sir Duke, I wish, Isn’t she lovely, As, Another star, etc.), la qualité des arrangements atteint des sommets de raffinement, sans qu’à aucun moment le projet d’ensemble ne se dilue dans les détails. Jamais depuis, malheureusement, Stevie Wonder n’a retrouvé un tel degré d’inspiration.
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