Le plus vivant et universel de tous les musiciens disparus : pionnier et ambassadeur des mixages grâce auxquels vivent les sons d’aujourd’hui, songwriter en apesanteur au charisme imbattable, Bob Marley est partout.
Dans les cours de récréation comme dans l’inconscient des musiques les plus diverses et aventureuses d’aujourd’hui. On réédite son très beau coffret Songs of freedom et ses fils sortent pour lui Chant down Babylon, un album qui réussit miraculeusement à marier sa voix et ses mélodies aux sons du rap en poussant à l’extrême l’art du sampling. Voici le récit d’une fascination intacte, gage de clairvoyance.
Qui a martyrisé le gros doigt de pied de Bob Marley ? L’histoire remonte au mois de mai 1977 lorsque, à la faveur d’un concert donné à Paris après la sortie d’Exodus, la maison de disques organise un match de foot sur un terrain proche de la tour Eiffel. On sait combien Marley vouait à ce sport une passion qui lui aurait, selon ses proches, fait envisager plus jeune la carrière de joueur professionnel plutôt que celle de musicien. Grâce à son ami Skip Cole, vedette du soccer jamaïcain, il en était arrivé à suivre un véritable entraînement, et rares étaient les jours où, le travail en studio terminé, il ne s’adonnait à son passe-temps favori dans la cour du 56 Hope Road à Kingston, en compagnie des autres Wailers.
Marley était indéniablement doué pour le ballon. Il caressait le cuir avec cette dextérité propre à ceux qui, des favelas brésiliennes aux ghettos africains, en ont appris l’usage nu-pieds sur des terrains cabossés. Lors de la première mi-temps de ce match « promotionnel » se déroulant sous le fin crachin d’un printemps pourri dont Paris a le secret, un joueur de l’équipe adverse écrase le pied de Marley : un incident en apparence sans gravité, mais dont les conséquences ultérieures se révéleront dramatiques.
Boitant bas, il quitte le terrain et doit consulter le médecin de l’hôtel où il réside, qui lui recommande de ne pas marcher le temps que la blessure cicatrise. Une telle précaution l’obligeant à annuler le reste de la tournée, le chanteur y renonce et poursuit sa route. A Londres, il quitte la scène du Rainbow en claudiquant. Lorsqu’il ôte sa chaussure dans la coulisse, son pied baigne dans le sang. Deux mois et quelques examens plus tard, Marley apprend qu’il souffre de ce cancer dont il finira par mourir en 1981.
Cette anecdote, bien que connue et diversement rapportée dans les biographies lui étant consacrées, m’a valu d’être à maintes reprises questionné sur l’identité de celui qui avait ainsi porté le tacle fatal à l’idole du reggae. Pour avoir été ce jour-là enrôlé dans l’équipe des Wailers (un honneur dont on ne saurait exagérer la portée, dans la mesure où les Wailers jouaient entre eux et ne vous passaient jamais la balle), des fans à la curiosité inassouvie ainsi que certains journalistes particulièrement scrupuleux ont cru pouvoir obtenir le nom de ce Judas en frappant à ma porte.
Il existe une photo de l’instant fatidique, où l’on voit un grand type un peu dégarni planter ses crampons sur l’auguste chaussure d’un Marley aminci dans un survêtement acrylique, la crinière de nattes gonflant un gigantesque bonnet de laine tricoté aux trois couleurs rasta. Le joueur adverse appartenait à une équipe constituée de quelques personnalités du show- business parisien se faisant appeler Les Polymusclés, nom qui en dit certainement assez sur la virilité investie par ces Dugarry du dimanche.
L’acharnement mis par quelques-uns à connaître peut-être à rencontrer, à confondre et, qui sait, à « justicier » l’auteur d’une faute, que tout arbitre international n’aurait pu sanctionner que d’un banal carton jaune, montre à quel point tout ce qui touche à Marley a suivi, en quelques années, une évolution faisant passer le moindre fait du biographique au légendaire, transformant le simple événement d’histoire en fragment d’une passion évangélique.
Avant que le radotage ne finisse par transformer ces quelques souvenirs en chevaux de parade d’un petit cirque intime, il est peut-être temps de s’en délester ici. Témoigner d’une relation particulière mais en aucun cas personnelle avec un artiste de cette stature est la plus avouable des raisons à la publication de ce récit. Vouloir être éclaboussé soi-même par l’admiration dans laquelle baignera éternellement le nom de Bob Marley en est peut-être une autre, moins consciente.
Marley est l’icône idéale. Elle nous renvoie l’image compatissante de ce que nos fragiles existences, intégrées par petits reniements successifs à un système de tyrannie sans visage, nourrissent comme rêves de rébellion. Nous vivons chaque jour un peu plus cruellement l’effacement de notre propre personnalité, l’enfouissement de nos délires intimes. Nous faisons si docilement le deuil de nos espérances que la présence, même posthume, de ce chaman à l’audace si saillante des chants de révolte à la coiffure échevelée nous est devenue indispensable. Que nous en soyons amenés à porter toute notre admiration sur des personnalités défuntes (qui ont dit « non ! ») mesure sans doute le peu de réaction qu’il nous reste. Quant à savoir ce que l’exploitation marchande de son image lui inspirerait constitue certainement l’ultime question que tout journaliste ayant croisé un jour Bob Marley souhaiterait lui poser aujourd’hui.
Chaque fois que de l’anonymat d’une rue surgit quelqu’un arborant un T-shirt à son effigie, s’insinue brièvement le doute d’une quelconque relation entre cette représentation sérielle de lui-même et la réalité d’un souvenir, d’une expression mémorisée. Comme victime d’une hémorragie interne, comme délavé de ses couleurs après plusieurs lavages, il pose sur nous
James Dean rasta un regard vide de sens, alors que l’intensité de ces deux éclats de quartz lui servant de pupilles se fait sentir depuis le jour où je fis malencontreusement l’erreur de ne pas soigner la phonétique d’un mot.
Ce jour-là, dans les salons d’un hôtel londonien de Kensington, c’était le lendemain du premier concert des Wailers donné au Lyceum, dont l’enregistrement allait servir à l’édition du Live paru en 1975 événement comparable à la prise du pont d’Arcole dans l’épopée napoléonienne. Dans l’un des salons se tenait une conférence de presse à laquelle assistait un tapis de journalistes encore secoués par le spectacle de la veille, comme débarrassés de leurs vieilles poussières et de leurs certitudes de commentateurs avisés d’une actualité musicale dominée par deux décennies d’hégémonie anglo-saxonne.
Vint l’instant peu glorieux où, jeune histrion de la presse spécialisée, je fis l’impair de poser une question sur l’embastillement de l’empereur Hailé Sélassié dans les geôles du colonel-dictateur éthiopien Mengistu. L’événement encore très récent laissait à penser que Marley, prophète de cette religion bizarre faisant d’un petit roi africain chétif un dieu vivant, serait sinon heureux, du moins concerné par cette évocation. Or mon zèle et ma fatuité me firent employer le terme « Négus » qui veut dire « roi » en amharique pour désigner son Impériale Majesté, ce que toute l’assistance, évidemment, compris « niggers ». Le sens de la question en sortait tout à fait chamboulé. De « envisagez-vous de libérer le Negus ? », tout le monde comprit « envisagez-vous de libérer les Nègres ? », ce qui n’est pas exactement la même chose. Et surtout, se ressent différemment si vous appartenez à la race désignée de la sorte par ceux qui souhaitent afficher leur supériorité, voire leur hostilité, à l’égard du peuple noir.
Un silence consterné saisit l’assistance, comme si la température avait brutalement chuté de plusieurs dizaines de degrés au-dessous de zéro, laissant pétrifié l’aréopage de reporters politiquement des plus corrects. Seul, à ma gauche, un petit groupe d’individus à la coiffure afro se pinçaient nerveusement le menton, tirant les poils de leurs barbichettes taillées à la Eldridge Cleaver, en pointant vers moi un regard très inamical. Je sus plus tard qu’il s’agissait des membres du Black Panthers Party anglais. L’oeil sévère mais restant courtois, Marley répondit, comme s’il avait affaire à un enfant d’un âge encore exempté de responsabilité morale, que les couleurs ne pouvaient constituer un motif de discrimination entre les hommes. L’incident fut repris, avec sarcasme, dans la presse britannique et je dus envoyer une lettre d’explication au Melody Maker qui fut publiée les jours suivants.
C’est sur cette gaffe involontaire que j’entamais une relation avec Bob Marley se résumant à quelques rencontres, plus ou moins formelles, à Londres, Paris et Kingston, et qui allaient marquer ma vie.
On ne saurait assez insister sur le caractère radicalement « autre » que portaient le reggae et Marley lorsqu’ils apparurent sur la scène européenne à l’orée des années 70. Marley était à la fois proche de Dylan, de Sly Stone tout en se situant à des années-lumière de ce que nous avions fréquenté jusqu’alors.
Le reggae ressemblait, de par son usage fréquent d’un système d’harmonies vocales enraciné dans la tradition baptiste, aux ensembles de doo-wop américains tels les Drifters et à leurs héritiers de Tamla Motown. Cependant, son rythme bancal lui octroyait une coquetterie tropicale, un zeste d’inédit qui, progressivement, plaçait l’auditeur sur une orbite vierge de toute fréquentation, le catapultait dans une ozone inexplorée selon un mode de dépaysement à la fois progressif et total. Intuitivement, nous sentions que derrière cette musique il y avait un monde différent du nôtre et cette attraction exotique poussa certains à entreprendre la traversée.
L’écoute de Catch a fire (album qui allait faire découvrir le reggae aux Occidentaux) s’apparentait à une expérience intégrale où, dans la plus totale innocence, nous nous trouvions à la croisée des mondes, le doigt posé sur une cicatrice que l’histoire officielle ne nous avait pas préparés à reconnaître. La performance vocale des Wailers drainait une substance émotionnelle inconnue, riche de beautés et d’entraves, de volupté, de douleur, de séduction et de rage. Le reggae n’était pas « le son du tiers-monde » comme cela fut dit à l’époque, mais plutôt celui d’une terre créole dont le petit agencement culturel s’était fracassé contre les brisants de la décolonisation. La « créolité », qu’elle ait pour origine Cuba, le Brésil, le Cap-Vert ou La Réunion, est le résultat d’une lente distillation des flux sonores et linguistiques hétérogènes dont le siècle, de biguine en samba et de calypso en mambo, s’enivra sans modération.
Métissage tout aussi sucré, le reggae est toutefois une expression créole « critique », s’étant pour ainsi dire évadé de l’enclos où les ex-puissances coloniales maintenaient jusqu’alors leurs petits plaisirs tropicaux : rhum, cigares, femmes mulâtres et danses collé serré. Au métissage d’origine, les musiciens jamaïcains avaient ajouté le « mixage » le dub et le sampling qui avait permis de déconnecter, de passer dans une autre dimension, d’entrer dans l’universel. Ainsi, en l’espace de quelques mois, le reggae était devenu, à l’insu des surveillants de ce monde façonné à la manière des dépliants touristiques, une fièvre dont la « viralité » avait été largement sous-estimée par les services de santé et dont Bob Marley incarnait le gène le plus contagieux.
Sa parole n’était pas compréhensible par tous. Marley adorait parler mais ne faisait aucun effort pour être compris, et cette manière de plier l’oreille de ses interlocuteurs à sa langue, de les contraindre à déchiffrer du sens à travers l’épais débit de son patois créole, ajoutait aux rencontres une épice supplémentaire. Car dans l’immeuble d’Harrington Gardens situé dans le South Kensington à Londres où nous avions rendez-vous, la bonne porte se reconnaissait à l’odeur : quand le fumet du ragoût de poisson et les effluves de ganja vous chatouillaient la narine, cela signifiait que vous approchiez du but.
Dans la pièce, il y avait toujours des « brethren », des frères, les uns roulant des joints, les autres tapant le carton ou jouant aux dominos. Il arrivait à Marley, avant d’entamer ses interviews, de s’entourer des tableaux de Hailé Sélassié et de Marcus Garvey, saintes croûtes aux coloris vifs, qu’il disposait de chaque côté du fauteuil dans lequel il prenait place. Il ne passait pas toujours le joint, mais lorsqu’il le faisait, c’était généralement pour moquer votre faible aptitude à fumer ce qu’il considérait comme l’herbe guérisseuse.
« Tu fumes combien par semaine, Bob ? Beaucoup, man. Oui, mais combien ? Sais pas. Peut-être cinq cents grammes semaine. Quand tu fumes, cela te révèle tel que tu es à l’intérieur. Tout ce qu’il y a de caché en toi, tout ce qui est pervers t’est révélé. C’est pourquoi les politiciens ne fument pas mais préfèrent prendre de la coke. Ils ont besoin de cacher leur vraie nature. La révéler serait les tuer. Ils ne le supporteraient pas (ricanement). »
Chaque rencontre donnait prétexte à une lecture de ses chapitres préférés de la Bible : en particulier l’Apocalypse, dans laquelle il puisait l’inspiration de certaines chansons et la pâte métaphorique de ses longs monologues que les journalistes occidentaux tentaient de suivre en dépit du fort accent et de l’hébétude consécutive aux quelques taffes inhalées du puissant mélange confiné dans de fins cônes de papier blanc. « Une fumée sortait de ses narines, de sa bouche des flammes dévorantes, car Dieu allumait sa colère. »
Les rastas ont la passion des correspondances. Chacune de leurs coutumes est justifiée par un passage du Livre et le moindre événement trouve son écho prophétique dans les psaumes et les versets. Il ne s’agit plus aujourd’hui de décortiquer ces mots à la recherche d’une signification cachée mais, au contraire, d’en goûter pleinement la sensation par le verbe, de sentir et de déguster à travers ces paroles d’un ésotérisme demeuré clos la distance nous séparant de ce monde-là. « Personne ne peut enseigner le rastafarisme, concédait Marley, c’est quelque chose qui naît avec vous. »
De sa naissance, il conservait un goût amer : « Je suis né à Babylone, c’est-à-dire au mauvais endroit. Mon père était capitaine dans la marine anglaise et il abandonna ma mère parce que sa famille avait honte qu’il ait un gosse avec une femme noire. Elle m’éleva comme elle put. Elle gagnait 50 shillings par semaine et avec ça devait subvenir à tous mes besoins, m’envoyer à l’école, m’acheter des chaussures, me nourrir. Elle n’avait qu’une distraction : la musique. Elle écrivait des chants religieux qu’elle entonnait le dimanche à l’église apostolique. »
Quand Cedella Booker se retrouva dans l’incapacité d’assurer son éducation, Marley devint un sans domicile fixe et erra dans Trench Town d’abris de fortune en refuges improvisés. Etre un métis à Trench Town dans les années 50 n’était en aucun cas une sinécure. En plus du typhus, de la poliomyélite et de la malnutrition régnait dans ce ghetto de l’ouest de Kingston une violence dont souffraient plus particulièrement les « outcasts ». Etre un « bâtard » lui a valu à l’adolescence de recevoir un coup de machette en pleine figure à la sortie de l’école.
Mais ce milieu hostile, loin de l’écraser, l’obligea à développer à l’intérieur un espace où il se mit à cultiver en secret une sensibilité trouvant bientôt son expression dans la musique. Certaines de ses meilleures chansons (Trench Town rock, Concrete jungle, Talking blues) lui ont été inspirées par ces années où il vécut la féconde clochardise de celui qui, n’étant de nulle part, en devient bienheureux partout.
De son enfance à Trench Town, Marley parlait d’une « souillure irrémédiable » et, quand il en venait à évoquer la Jamaïque, il comparait son île à un « oeuf brisé » dont personne ne pouvait recoller les morceaux. Pourtant, de ce fumier, il sut extraire une poésie que fredonne la terre entière. Trench Town n’existe plus, rasé par le gouvernement pour cause d’insalubrité. Mais d’autres ghettos, plus misérables encore, ont pris sa place. Vous vous surprenez à ne plus être dans ces lieux que le produit de vos fantasmes, l’écho inquiet de la réputation faite à ces nasses humaines, la somme des peurs laissées en pâture à votre imagination. Or, chaque fois, de West Kingston, de Soweto ou d’ailleurs, vous ressortez reconnaissants, non d’avoir eu la vie sauve, mais d’avoir vécu quelque chose, d’avoir agrandi votre esprit, enrichi votre compréhension du monde. Bob Marley et le reggae se sont rencontrés là, dans ces confins des indigences, cet appendice de l’abandon, ce territoire d’outre-merde. Mais est-ce bien un hasard ?
Zone d’accouchement de toutes les émotions, de tous les états psychologiques, du désespoir à la pugnacité, riche de tous les comportements, de l’inhumain au trop humain, Trench Town offrait une palette à partir de laquelle il brossa ces miniatures élégiaques, ces brefs instants de musique qui témoignent de la vaste réalité du monde.
La petite maison coloniale de New Kingston était devenue un lieu saint. Des mamans conduisaient leurs enfants jusqu’à Bob, avec une pochette de disque à faire signer, un petit objet d’offrande exécuté à l’école, dans les mains. En sortant, les gosses avaient les yeux brillants comme après être monté sur les genoux du père Noël. Beaucoup venaient ici dans le seul but de s’imprégner du pouvoir qui émanait de ces lieux. On y croisait des clochards, des ministres, des top-models, des rastas et des punks.
Le premier étage, où il avait installé son bureau, semblait plus animé qu’une cour royale. Il s’y passait plus de choses que dans le cabinet du Premier ministre Michael Manley. Et d’avoir détourné ainsi à son profit une grande partie de l’attention lui valut de tenaces inimitiés. Depuis sa tournée triomphale en Afrique de l’Est, le drapeau du Zimbabwe flottait au sommet du toit. A sa manière, Marley avait contribué à la victoire du mouvement de libération dans la guerre de sept ans qui l’opposa au régime colonial de l’ancienne Rhodésie. Sa chanson Zimbabwe, reprise dans les tranchées, avait fourni un soutien moral aux soldats de la Zanla (Zimbabwe African Liberation Army) et il tirait une immense fierté d’avoir ainsi participé à l’écriture d’une page de l’Histoire avec un grand H. Qu’une simple chanson puisse déborder le champ poétique pour envahir l’espace du réel, participer à sa transformation, est un privilège réservé aux plus grands.
Ainsi, jamais avant Marley un artiste n’avait réussi à rapprocher des communautés aussi éloignées l’une de l’autre. Le tiers-monde reconnaissait en lui l’interprète de ses humiliations, le traducteur de ses espoirs. La jeunesse occidentale découvrit à l’écoute de ses chansons une partie refoulée de sa propre histoire celle des générations précédentes où continuaient à pourrir relents coloniaux et pulsions racistes.
Mais l’euphorie qui flottait dans l’air était trompeuse. Agonie veut dire combat, et Marley fut un bel athlète, de corps et de coeur. La lutte engagée avait été bien menée, malgré des déboires, des dégoûts, des convalescences. Ce jour-là, il jouait encore au ballon, nattes au vent, sur l’aire du 56 rue de l’Espoir. Mais c’est la mort qu’il tentait de dribbler.
Quelques minutes auparavant, il en parlait avec une arrogance qu’on lui connaissait bien.
« Crois-tu en la résurrection ? Je ne sais rien de la résurrection. Je vis le temps présent et je sais que si Babylone n’essaie pas de me prendre cette vie, Dieu me laissera la garder pour toujours. Je ne mourrai jamais ! »
Francis Dordor
Songs of freedom (coffret 4 CD, Island/Universal).