Anciens disciples d’Arcade Fire, les Canadiens de WOLF PARADE se libèrent de leur joug et prennent une folle altitude.
Quand quelqu’un réussit aussi bien ses débuts que Wolf Parade, il y a non seulement de l’excitation dans l’anticipation de son deuxième album, mais aussi une certaine angoisse. Le groupe sera-t-il à la hauteur des attentes ? Dans le cas présent, les Canadiens allaient-ils conserver cette fièvre, cette dynamique qui, il y a trois ans, transcendaient Apologies to Queen Mary ?
Réalisé entre-temps, l’album de Handsome Furs, projet parallèle du chanteur Dan Boeckner, apportait une réponse à double tranchant : certes le talent et le
style demeuraient, évidents, mais avec l’avènement de ce nouveau groupe, quelle place serait laissée à l’ancien ? Dès les premières notes de At Mount Zoomer, on est rassuré ; dès les premières paroles, on est emballé. “In my head, it’s a city at night.” Car le fer de lance de Wolf Parade, c’est Boeckner, ses mots, sa conviction, sa voix agile et brûlante, comme si Bono avait troqué le prêche pour l’angoisse. Ce chanteur, plus qu’un atout, est pour le groupe une base sur laquelle construire.
Au milieu des chansons, il est à la fois le phare et la tempête. Et Wolf Parade, comprenant tout le parti et la liberté qu’il pouvait en tirer, a ouvert les vannes de son imagination. Si la raideur rythmique, les guitares post-punk, maigres et coupantes, sont toujours là, ce sont les claviers qui ont été mis à contribution pour édifier des constructions ambitieuses, des morceaux pleins de mystères, de recoins et de portes dérobées. Ça commence souvent par une petite ritournelle, un thème anodin et espiègle, et peu à peu la machine s’emballe.
Il y a des éclairs, des lampes qui clignotent, des bruits suspects, des spectres (California Dreamer) et toute une machinerie de train fantôme. Ça monte (The Grey Estates), ça descend (Bang Your Drum), ça devient vertigineux (Language City). Et enfin l’aventure culmine avec les dix minutes finales et étourdissantes de Kissing the Beehive. La prochaine fois qu’on sera inquiet avant d’écouter un disque de Wolf Parade, on saura pourquoi…