Le mensuel polémiste « Causeur », plus proche d’Eric Zemmour que de « Causette », consacre son numéro d’été à « la terreur féministe », illustrée par une femme tronçonneuse à la main. Subtil.
Nous avons longuement hésité à parler du dossier estival du mensuel Causeur, spécialiste de la provoc’ réac. Mais voilà, proposer à la vente en 2015 un dossier sur la « terreur féministe » avec pour visuel une jeune femme lookée fifities, une tronçonneuse à la main, surmontée du sous-titre : « sexisme, inégalités, harcèlements… Elles vous ont à l’oeil! », était pré-destiné à nous agacer. Alors ok, en en parlant, on prend le risque de leur faire de la pub’, voire de tomber dans le piège de la provoc’ facile, mais tant pis.
Plutôt que de leur répondre sous la forme d’une tribune, nous avons préféré piocher dix citations dans ce dossier visant à faire passer les féministes pour d’odieuses harpies qui manquent d’humour.
– « Défense de rire, défense de dire, défense de désirer: il est temps de se révolter- faute de quoi il ne se trouvera personne pour vous plaindre le jour où votre tour viendra de passer à la casserole féministe. »
Elisabeth Lévy, rédactrice en chef de Causeur (oui, c’est une femme qui a eu la « bonne idée » de ce dossier ndlr), tire la sonnette d’alarme : sous couvert d’égalité, les « néo-féministes » instaurent un système fascisant visant à soumettre les hommes. Cette théorie d’un Big Brother féministe à l’œuvre est une vieille martingale des réacs depuis la parution du Premier sexe d’Eric Zemmour en 2006. Il serait temps de changer de disque…
– « Il est doux de mener un combat déjà gagné. »
Les femmes gagnent en moyenne 24% de moins que les hommes (source: Observatoire des inégalités, 2015) et 100% des femmes auraient déjà été harcelées au moins une fois mais à part ça, tout va bien.
– « Chantage sexuel? Ne s’agissait-il pas, plus simplement, de ce que l’on appelait dans un passé pas si lointain la « promotion canapé », échange de services entre deux parties consentantes à ce négoce? »
C’est vrai, pourquoi faire des études quand on peut gravir les échelons en cédant aux avances de son boss ? Et si Elisabeth Lévy devenait scénariste chez Dorcel ?
– « Et le féminisme créa la pouffiasse. »
Et Causeur découvrit le slut shaming en 2015.
– « La chasse à l’homme des féministes, on n’y résiste pas. On y cède de peur d’être sa prochaine victime. »
Notons que Causeur a un goût prononcé pour les analogies guerrières. Leur coté amazone sans doute.
– « Il parait que nos arrière-grands-pères n’avaient pas à se soucier de faire plaisir à nos arrière-grands-mères. J’espère qu’ils en ont bien profité. La femme moderne, elle, doit jouir. Elle le clame et le réclame. »
Alors qu’elle devrait affectueusement accepter le bâillon de son tendre époux.
– « A ce propos, un soir j’étais aux putes à Anvers (…) Porte de la salle de bains ouverte, elle lavait son machin dans le bidet. Adios! Je renfilai mon manteau et déguerpis. (…) Dans la rue, je pensais au mâle que j’aurais pu être il y a un siècle. Ah! après l’avoir sautée, la beigne que je lui aurais flanquée avant de décamper sans payer! Et ce n’est même pas moi qui aurais passé la meilleure soirée. »
Vincent Castagno, journaliste chez Causeur, remporte la palme de l’article le plus vomitif du dossier avec sa réflexion indigeste sur l’orgasme féminin (voir plus haut), et le récit de sa visite frustrée à une prostituée dans laquelle il souhaitait « vider son amertume ».
– « Vous, les féministes, je ne vous aime pas du tout. D’Eros et Thanatos, vous n’avez gardé que Thanatos. Vous êtes de gauche. »
Il faudrait demander à Christine Lagarde, NKM ou Rama Yade ce qu’elles en pensent.
-« Embrasser une femme pour la saluer? A peine tolérable. A moins, bien sûr, d’avoir le physique de Conchita Wurst et les manières de Stéphane Bern. »
En début d’année, Sandrine Rousseau, porte-parole nationale d’EE-LV et auteure d’un Manuel de survie à destination des femmes en politique, soulignait la proximité qu’instaure, de fait, une bise contrairement à une poignée de main, et rappelait que si la politique implique d’être tactile, des gestes « perçus comme de la franche camaraderie » s’ils viennent de la part d’un homme ont une fâcheuse tendance à instaurer « une sorte de trouble » lorsqu’ils viennent d’une femme. Un ressenti que semble totalement ignorer Causeur.
– « Rien ne les met plus en joie qu’un nouvel interdit, assorti de nouvelles sanctions. Rien, sinon le spectacle d’un homme à terre. »
Pour prendre son pied, une féministe doit forcément être émasculatrice et liberticide. Bien entendu.