Créateurs, restaurateurs, photographes : le choix des Inrocks.
Arnaud Vaillant et Sébastien Meyer (Coperni), 25 et 26 ans, créateurs
Faire une proposition au-delà du simple vêtement : pari réussi pour le duo derrière la brillante marque de mode Coperni. Leurs silhouettes architecturales, alliant épure et portabilité, ainsi que la rigueur de leur business model – l’un est au stylisme, l’autre au développement de marque – séduisent le jury de l’Andam en 2014 et du prix LVMH en 2015… Mais, surprise, Coperni quitte soudain la compétition. Avec raison : le tandem Vaillant-Meyer vient d’être choisi pour reprendre Courrèges, la célèbre maison de couture des sixties. Verdict en octobre. FB
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Simon Porte Jacquemus, 25 ans, créateur
Ce jeune homme solaire insuffle énergie pop et fantaisie dans la mode. Adopté par Lady Gaga, il s’apprête à présenter “Valérie”, une nouvelle collection inspirée par sa mère.
Dans dix ans, la mode va ressembler à quoi ?
Je suis un rêveur, j’espère qu’on va aller vers plus de poésie, de “vrai” et moins d’icônes fashion américaines. La mode actuelle manque d’histoires. On me parle souvent de vêtements, j’en parle très peu. Le moteur de la création se situe ailleurs. J’aimerais qu’on renoue avec l’émotion et la fantaisie palpable de la fin des années 80.
Plus de 160000 personnes te suivent sur Instagram. Tu penses que la forme du défilé est anachronique ?
J’étais contre les défilés, je voulais faire des tableaux, des propositions plus artistiques. Mais je me suis rendu compte que le moment du défilé est tellement spécial pour le créateur et l’audience qu’il est irremplaçable. Plus j’ai de liberté et plus j’ai envie d’utiliser cette forme pour créer une expérience. Je m’en fiche de montrer deux looks ou dix. Ce qui m’importe, c’est ce qui se transmet et qu’on ne peut pas partager autrement. La mode, avant d’avoir le bon styliste ou le bon photographe, c’est une énergie. J’utilise beaucoup Instagram. J’adore cette époque. Dans la mode, je veux ne mettre aucune barrière entre les gens et moi.
Ton idéal, c’est de rester indépendant ?
Oui. Jacquemus n’est pas un pied d’appel, je n’essaie pas de me faire un CV. J’ai déjà refusé des maisons. L’excitation, c’est de faire ce que je veux et de continuer à faire exister la fille Jacquemus. Elle est brute, naïve, comme dans l’enfance, Charlotte Gainsbourg dans L’Effrontée ou Isabelle Adjani dans L’Eté meurtrier.
propos recueillis par GS
VETEMENTS, 1 an, créateurs
Derrière ce nom générique se cache un groupe de sept designers anonymes – seul un nom, Demna Gvasalia, ancien du studio Vuitton, a filtré dans la presse – pour que le focus reste avant tout sur leurs productions. Normal que cela sonne familier : les sept, issus de l’Académie royale d’Anvers, de Die Angewandte à Vienne et du Studio Berçot à Paris, ont tous passé un temps chez Maison Martin Margiela, grand pape de la création sans visage. Autre bête noire de VETEMENTS, les tendances saisonnières : le collectif esquisse un vestiaire intemporel, composé de basiques de qualité relevés de détails décalés – un ourlet effiloché, de l’oversize, une touche androgyne… Le résultat balaye le concept “une collection = un thème” que le collectif considère comme un puissant frein à la création. Leurs pièces singulières et affranchies, mais plus encore la fraîcheur de leurs revendications, secouent depuis deux saisons une fashion week parisienne en mal de renouveau. FB
Harry Cummins, Julia Mitton et Laura Vidal, 32 ans, 31 ans et 31 ans, restaurateurs itinérants
Ils ont à peine plus de trente ans et leur concept de restaurant éphémère cartonne. Le trio nomade du Paris Popup n’a pas fini de rendre la gastronomie excitante et responsable.
La gastronomie est aujourd’hui centrale dans la vie culturelle des trentenaires. Cette mode va durer ?
Il n’y a aucune raison que cela s’arrête car nous sommes à un tournant. Les restaurants sont devenus des lieux cool, oui. Mais la provenance des produits intéresse. Avant, seul le résultat dans l’assiette comptait. La conscience que nous sommes en train de bousiller la nature crée un désir de rédemption. La recherche de plaisir devient différente. C’est une question philosophique, liée à nos choix collectifs.
Le Paris Popup fonctionne sans restaurant fixe. Pourquoi ce goût de l’éphémère ?
Ce ne sont pas les produits qui viennent à nous, c’est nous qui venons aux produits et à leurs producteurs. France, Espagne, Angleterre, Canada, Etats-Unis, Japon, Maroc, bientôt l’Italie… A chaque expérience de “pop up”, il se passe des choses puissantes. C’est aussi une façon pour nous de ne pas rentrer dans un système, d’éviter les dettes liées à l’achat d’un restaurant. On donne toute notre énergie sur le court terme. Peut-être que cette liberté attire les foodies, ce côté happening, antiroutine…
Les chefs sont devenus des stars. Forcément une bonne chose ?
Les cuisiniers doivent utiliser leur visibilité à bon escient, sans croire justement qu’ils sont des rockstars. Leur devoir est de contribuer à la vie des autres, de leur remplir le ventre. Quel pouvoir et quelle responsabilité ! propos recueillis par OJ
Le Paris Popup est en résidence d’été au Grand Hôtel Nord-Pinus à Arles jusqu’au 30 août, theparispopup.com
Sophie Cornibert et Hugo Hivernat (Fulgurances), 30 ans et 25 ans, organisateurs d’événements culinaires
Elle a étudié le cinéma, lui a traîné dans le milieu des concerts alternatifs, avant d’unir leurs forces et de créer Fulgurances. A peine trentenaires, Sophie Cornibert et Hugo Hivernat incarnent l’idée que la cuisine sort de l’assiette pour intégrer la pop culture, avec son esthétique propre. Celle de Fulgurances est résolument épurée, douce, ultracontemporaine. En plus d’événements prisés – dîners à quatre mains, mise en avant des seconds de grands restaurants, contribution à l’expo Le Bord des mondes au Palais de Tokyo –, les compères publient la belle revue Itinéraires d’une cuisine contemporaine (numéro 2 actuellement en librairie). A l’intérieur, pas de recettes mais la mise en avant des univers culinaires les plus audacieux. Prochaine étape en vue pour le duo, la création à l’automne de leur propre restaurant, L’Adresse, rue des Boulets à Paris, dont le chef changera tous les six mois. Parce que “la cuisine vit”, comme le dit leur punchline. OJ
Delphine Zampetti, 39 ans, street foodiste
Alors que la gastronomie tremble sur ses bases, la street food incarne un avenir sans chichis. Mais échapper au trio burger/kebab/sandwich rassis reste un problème. Delphine Zampetti l’a compris avant les autres. Dans son échoppe CheZaline, cette ancienne des beaux-arts, fan de Christophe, propose des sandwiches cuisinés – avec poulet en pot-au-feu et pickles, par exemple – et même un jambon-beurre cornichon qui aide à pardonner tous les autres. Dans cinq ans, tout le monde fera pareil. OJ
CheZaline, 85, rue de la Roquette, Paris XIe
Dorothée Smith, 29 ans, photographe
Elle a, comme peu dans sa génération, photographié la fabrique du genre et des identités, rassemblée dans un très beau premier ouvrage, Löyly. Déjà forte d’un travail extrêmement mature qui décloisonne la pratique photographique, Dorothée Smith s’en va explorer une autre de ses obsessions : les fantômes. En attendant Spectographies, son premier moyen métrage attelé à une appli (avec la participation de Mathieu Amalric, Stéphanie Michelini, Dominique Blanc, Bernard Stiegler…), on pourra cet été voir aux Rencontres d’Arles une version liminaire de Traum, sa nouvelle installation transdisciplinaire (photo, vidéo, son, sculpture), qui met en scène un ingénieur en aonté à la décomposition de son identité. GS
Pierre-Ange Carlotti, 25 ans, photographe
Autodidacte, ce jeune homme originaire de Corse, aux faux airs de Guillaume Dustan, a commencé à prendre des photos en boîte de nuit, avec des appareils jetables. Ses clichés, fiévreux, parfois crades, capturent une nouvelle garde parisienne (sa meilleure pote Clara 3000, Jacquemus…) et réintroduisent asphalte et intensité dans la photo de mode. “Je suis attaché au fait d’attendre, de ne pas voir”, explique celui qui ne jure que par l’argentique. GS
pierreangecarlotti.tumblr.com
Levalet, 26 ans, street artiste
Comment réveiller et illuminer la ville ? C’est ce à quoi doit rêvasser Charles Leval, alias Levalet, lorsqu’il se rend au collège pour donner ses cours d’art plastique. Souvent comparé à Banksy – “par ceux qui ne connaissent que lui” –, Levalet dessine sur papier au pinceau et à l’encre de Chine des œuvres grandeur nature qu’il colle sur les murs. “Moins par peur des amendes que par confort, pour prendre mon temps”, précise-t-il. Cet admirateur de Buster Keaton et d’Ernest Pignon-Ernest développe un art illusionniste à l’humour tordu qui se joue des perceptions. AL
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