Déjà-vu. Nancy Sinatra : à l’occasion de rééditions, portrait d’une fille fatale, mi-Barbie, mi-Barbarella. Le soir de Noël 1966, chez les Sinatra, on a repris trois fois de la dinde aux marrons. Au cours des douze mois précédents, Frank, le père crooner, a réussi un hold-up planétaire (Strangers in the night) tandis que Nancy, la […]
Déjà-vu. Nancy Sinatra : à l’occasion de rééditions, portrait d’une fille fatale, mi-Barbie, mi-Barbarella.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Le soir de Noël 1966, chez les Sinatra, on a repris trois fois de la dinde aux marrons. Au cours des douze mois précédents, Frank, le père crooner, a réussi un hold-up planétaire (Strangers in the night) tandis que Nancy, la fille crâneuse, a chaussé une paire de bottes en or massif. These boots are made for walkin’, profitant de l’aubaine d’une grève massive dans les transports new-yorkais, est devenu l’hymne de tous les marcheurs forcés. Avec sa basse désaccordée tel un bas qui glisse dans l’intro, son beat claquant comme un porte-jarretelles, ses coups de trompette aussi courts que les vêtements de la miss, la chanson suffit à propulser Nancy bombinette sulfureuse de l’année. Une année miraculeuse, qui fait de Nancy Sinatra l’ambassadrice de l’ultra-minijupe, la voit donner la réplique à Peter Fonda dans le film Wild angels et, surtout, enregistrer pas moins de quatre albums, soit un par saison. Jusque-là, la fille à papa, entrevue en potiche sexy dans les shows de son père pour la télé américaine, n’avait publié que de timides singles. Sa rencontre avec le compositeur Lee Hazelwood et l’arrangeur Bill Strange, comme son relookage mi-Barbie, mi-Barbarella, en feront un modèle international d’émancipation. Boots, In London, Sugar et How does that grab you’, tous réédités ces jours-ci et complétés par les singles et faces B parus jusqu’en 68, constituent l’essentiel d’une discographie furtive mais honorable. Chaque disque est passablement construit selon le même schéma : des reprises de tubes du moment (As tears go by, Day tripper) ou plus anciens (On Broadway) et des compositions d’Hazelwood, que l’on peut distinguer en deux genres : la veine Boots, influencée par la surf-music et Bo Diddley, et l’autre, sorte de « country-pop orchestrale », largement plus ambitieuse. C’est dans ce registre que le style capiteux, de quasi tragédie d’Hazelwood, résistera le mieux à l’épreuve du temps, avec les immortels Summer wine ou Sand. Pendant les séances, celui-ci n’hésitait pas à pousser l’ingénue dans de périlleux retranchements : « Mords dans les textes, lui ordonnait-il, ne chante pas comme une gamine, fais-le pour les routiers ! » On murmure que pour promouvoir ces rééditions, Nancy Sinatra a accepté de poser nue pour Playboy. Visiblement, la reine de la marche à pied n’a jamais oublié les routiers.
{"type":"Banniere-Basse"}