Avec sa nouvelle version de Thor, devenue une femme, Marvel se rachète quelques bons points féministes. Mais continue de se vautrer dans tous les écueils qui croisent sa route.
L’année dernière, un gros tollé a secoué le monde du comics. Marvel faisait l’annonce d’une version féminine de Thor, le dieu nordique du tonnerre aux gros biscotos et au carré long platine. « Ce n’est pas une Thor. Ce n’est pas Madame Thor. Ce n’est pas Thorita. C’est juste Thor », commentait fièrement Jason Aaron, l’un des écrivains de la firme, pour décrire son nouveau personnage.
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Tollé, donc, le mot est juste : un orage de critiques des fans de comics – arguant en substance que Thor est bien trop héroïque et fort pour être une gonzesse – s’était abattu sur la firme. Quelques mois après la sortie de ce nouvel opus, on y voit maintenant plus clair. Les premiers chiffres sont tombés : Thor féminin pète les scores de vente. Les cinq premiers tomes de la nouvelle version battent de 30% les cinq premiers tomes de la précédente, sortis en 2012. C’est près de 20 000 exemplaires de plus par mois, et ce chiffre n’inclue même pas les exemplaires numériques. Doit-on ce beau succès au proéminent thorax de la nouvelle héroïne ? Que nenni.
« Les marteaux sont redoutables sur un plafond de verre »
Loin des tenues ambiance porn de Spider Woman du même label (et Cat Woman du concurrent DC Comics), Marvel n’a pas profité de la transition de son personnage pour l’affubler d’un micro-costume moulant ses attributs désormais féminins. En bonus, c’est avant tout le public féminin qui remercie Marvel de lui donner (enfin !) un personnage féminin qui en a dans le pantalon, comme en attestent les éloges des geekettes par blogs interposés. Comme le souligne avec force humour noir le site américain Jezebel, « les marteaux [arme de prédilection de la désormais déesse nordique, ndlr] sont redoutables sur un plafond de verre. »
Mais avec Marvel, c’est un pas en avant, un pas en arrière. Au mois de mai, le label lançait « A-Force », une série de comics entièrement dédiée à une équipe d’Avengers féminines. Une bonne nouvelle, en apparence. Mais en apparence seulement. Car à y regarder de plus près, c’est un festival de latex moulax, de micro-culottes, de bas-résilles et de brushings de compèt’. Après tout, il ne faut pas oublier que l’année dernière, le directeur éditorial de Marvel Comics, Axel Alonso, expliquait qu’il était « impossible de ne pas sexualiser les personnages féminins« . Impossible, vraiment ? A moins de dessiner avec un crayon qui prend les décisions à sa place…
Black Widow en comédie romantique
Quant au PDG de Marvel, Ike Perlmutter, il ne peut pas s’en empêcher non plus : les films de super-héroïnes, ça lui hérisse le poil. On a découvert suite au piratage de Sony, en mai, des échanges de mails dans lesquels il les qualifie de « désastres », suggérant que les mauvais scores de ces films au box office doivent tout au fait que des femmes y tiennent le haut de l’affiche. Pourtant, les films avec un rôle féminin fort rapportent plus d’argent, selon une étude américaine basée sur le test de Bechdel.
Récemment, Scarlett Johansson ironisait dans une pastille de l’émission Saturday Night Live… Qui ressemble presque à une lettre ouverte aux patrons de la firme. Cette fausse bande-annonce imagine avec humour (noir) ce à quoi pourrait ressembler un film sur le personnage campé par l’actrice dans Avengers, Black Widow. Verdict ? A une comédie romantique à la croisée de Coup de foudre à Notting Hill et Confessions d’une accro au shopping.
Dernier espoir en attendant que Marvel tire une bonne fois pour toutes les leçons du succès de sa nouvelle Thor et arrête de prendre femmes pour des idiotes: la chaîne américaine CBS diffusera à partir d’octobre la série SuperGirl, histoire de la cousine de SuperMan née chez DC Comics. Ca démarre comme Le Diable s’habille en Prada – des plans de Manhattan vus d’en haut sur fond de musique pop, une nana sympa et un peu gauche, une boss tyrannique, des histoires de cœur… Et puis en fait, non : SuperGirl botte des culs, et n’a même pas besoin de montrer le sien. Gardons espoir.
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