Les hommes sans visages. Après avoir oeuvré derrière Björk ou Black Dog, Plaid invente la technonirique, aussi exigeante que séduisante. Ed Hanley et Andy Turner ne sont pas des personnages publics, ils ont au contraire choisi (avec un certain plaisir) de se conformer à un des mythes fondateurs de l’imaginaire techno, celui de l’artiste “faceless”, […]
Les hommes sans visages. Après avoir oeuvré derrière Björk ou Black Dog, Plaid invente la technonirique, aussi exigeante que séduisante.
Ed Hanley et Andy Turner ne sont pas des personnages publics, ils ont au contraire choisi (avec un certain plaisir) de se conformer à un des mythes fondateurs de l’imaginaire techno, celui de l’artiste « faceless », l’homme sans visage totalement dissimulé derrière ses machines, luttant férocement contre un autre mythe tenace de la musique anglaise : la pop-star. Alors que, de Prodigy à Photek, de Tricky à Goldie, la dance-music anglaise s’est soudain découvert marketing oblige un goût pour les gueules, eux continuent d’exister en compagnie des ombres loin, très loin du délit de belle gueule régulièrement prononcé par les puristes à l’encontre des renégats (?) qui quittent les corridors de l’underground pour la pleine lumière. Pourtant, un simple coup d’oeil à leur parcours les place d’emblée parmi les musiciens les plus novateurs de ces dix dernières années. Ils furent ainsi les deux tiers de Black Dog, un des groupes phares de la scène « intelligent techno » anglaise, pilier des compilations Artificial intelligence du label Warp, auquel ils sont restés fidèles. On les repéra également dans la peau d’artisans éclairés du revival electro pour le label Clear, en tant que producteurs pour Nicolette ou dans le rôle de solides remixers. L’histoire se souviendra également qu’ils furent, en 1995-1996, les musiciens attitrés de Björk. Une constance assez remarquable qui leur vaut la fidélité de leur public et de leurs partenaires d’un temps : on retrouve ainsi Björk et Nicolette sur deux morceaux de ce Not for threes touffu et fascinant (Lith et Extork).
Une fidélité qui pourrait faire de Plaid un groupe aux surprises finalement assez rares, si le duo ne possédait pas un goût prononcé pour les pas de côté. Ici, Plaid réussit à éviter l’écueil majeur inhérent au genre intelligent techno : celui d’un hermétisme volontaire confinant à l’ennui le plus total. Not for threes est en effet un album facile et agréable, non dans sa conception, mais dans son rapport à l’auditeur. Car Plaid reste un groupe aussi exigeant que peu enclin à la froideur de rigueur dans l’intellectualisme techno : influences ethniques (Orient pour Rakimou, Trinidad pour Myopia), jazz-funk (Kortisin), techno old-school (Seph)… Si le terme n’avait pas un arrière-goût franchement péjoratif, on serait même tenté de dire que Not for threes a tout d’un album classique, aux deux sens du terme. La preuve de la maturité d’un genre et d’un groupe.
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