Premier tome d’une série à l’ambition immense, par un jeune Américain qui fait cohabiter humains et animaux parlants, à l’intelligence et au fanatisme également partagés.
Dans Duncan, le chien prodige, première bande dessinée du jeune Américain Adam Hines, les animaux parlent et cohabitent avec les humains. Ils assurent les mêmes fonctions que dans notre monde (compagnie, nourriture…) mais, plus ou moins satisfaits de ce sort et dotés d’un esprit critique, ils débattent sur la nature de leur relation avec les hommes. Alors qu’une nouvelle loi qui contrôlerait leurs droits est en préparation par les humains, le groupe terroriste Orapost, mené par un hargneux macaque femelle, commet un attentat dans une université, secouant le fragile équilibre liant bêtes et hommes.
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Duncan, le chien prodige est d’une ambition rare. Cette BD n’est que le premier tome d’une série de neuf qui selon l’auteur devrait totaliser à terme (dans une vingtaine d’années) 2 600 pages – Duncan en faisant 400. Un projet qui semble fou et qui pourtant a solidement été pensé, comme en témoigne cet extraordinaire volume. Autour de cet attentat et de l’enquête du FBI qui s’ensuit, Adam Hines raconte mille et une histoires mettant en scène chiens, chats, singes, vaches, cochons, couvées et humains. Les récits, ou bribes de récits, s’imbriquent, se complètent ou se percutent pour brosser un monde complexe où la cruauté est de tous les côtés, chez les hommes cupides comme chez les animaux fanatiques, mais où l’intelligence aussi est partagée.
Juste et sensible, Adam Hines n’est jamais démonstratif. Il fait preuve d’une créativité sans limites dans le graphisme et la mise en scène. Donnant à son récit un rythme saccadé et haletant, il entremêle des planches classiquement composées de cases avec des mises en page plus éclatées et emplies de collages, de textes et de dessins. Son incroyable palette de gris donne une formidable unité à l’ensemble. On pense aux livres de Dave McKean ou aux expérimentations des auteurs du Frémok.
Cette liberté folle n’est pourtant jamais gratuite et Adam Hines sait où il va. Malgré la profusion d’idées et de personnages, malgré les sauts dans le temps et les histoires dans l’histoire, Duncan, le chien prodige est d’une belle cohérence et se lit d’une traite. À la fin de ce premier épisode, l’enquête est bouclée, on retombe sur ses pieds – ou ses pattes. Poignant, passionnant et, bien sûr, touffu.
Anne-Claire Norot
Duncan, le chien prodige d’Adam Hines (Éditions Ça et Là), traduit de l’anglais (États-Unis) par Fanny Soubiran, 400 pages, 32 €
La BD est disponible intégralement et gratuitement en ligne, en anglais, à cette adresse.
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