2001 n’a pas pris une ride. Pour la caméra des inrocks.com, Christiane Kubrick, épouse du réalisateur et Jan Harlan, beau-frère et producteur des oeuvres de Kubrick depuis Barry Lyndon, évoquent les raisons profondes de cette étonnante modernité.
Jan Harlan : L’essence même du film est toujours d’actualité et le sera encore dans cinquante ans. Il y a bien eu depuis des progrès techniques, mais reste cette insondable question au c’ur même du film. On n’en sait pas plus aujourd’hui sur ce grand secret qu’est la création de l’univers. C’est ce qui fascine les gens, ou pas’ On va peut-être se rendre compte que le style du film est trop lent pour le public d’aujourd’hui. On verra bien.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
Christiane Kubrick : On nous a souvent demandé pourquoi le Vatican s’intéressait au film. La réponse est simple : le monde est plein d’agnostiques en quête d’un principe fondateur, on a tous peur de mourir, à plus forte raison sans croyance à laquelle se rattacher. 2001 contient beaucoup de pistes de réflexion.
La seule chose qui tracassait Stanley c’est que l’image, les décors ou les costumes paraissent démodés comparés à ce qu’on fait aujourd’hui en matière d’effets spéciaux. Cela peut paraître effectivement naïf d’avoir voulu montrer les choses de cette façon ; mais je pense que le public saura se replacer dans le contexte de sa création : en 1968, cela n’avait jamais été fait. Aujourd’hui, l’espace est tellement noir et sale À l’époque on le trouvait encore beau et lumineux.
Bizarrement, cela va aussi faire sourire de voir ce qu’on pensait alors : le film est beaucoup plus enthousiaste sur les progrès techniques, l’exploration de l’espace, que la mentalité d’aujourd’hui. Les costumes tiennent le coup compte tenu qu’on aurait pu en faire trop : vous êtes trop jeunes pour vous en souvenir, mais on pensait tous qu’en 2001 on serait habillés d’or et d’argent, qu’on se baladerait dans les airs en mini jet. Certaines choses se sont réalisées, comme le téléphone portable. Mais ce n’est pas ce qui compte à mon sens. L’ossature du film est intacte, toujours émouvante. Je me rappelle avoir pensé, lorsqu’on discutait du film au Vatican, que nous avions planché très dur sur quelque chose dont ils pensaient détenir la réponse.
Jan Harlan : Je me souviens d’un bon mot de Stanley pour résumer son travail sur ce film : « c’est la tentative d’un imbécile de raconter quelque chose d’incompréhensible« ?
Christiane Kubrick : Et c’est en cela que toutes les interprétations du film sont possibles.
{"type":"Banniere-Basse"}