PJ Harvey, Nick Cave et leurs amis se réapproprient les chansons de Kurt Weill, paraboles du monde contemporain. Figure majeure de la musique du xxème siècle, tous genres confondus, Kurt Weill (1900-1950) demeure l’un des compositeurs les plus célébrés. On peut s’interroger sur cet engouement, qui n’a pas fléchi depuis les premières chansons de Weill […]
PJ Harvey, Nick Cave et leurs amis se réapproprient les chansons de Kurt Weill, paraboles du monde contemporain.
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Figure majeure de la musique du xxème siècle, tous genres confondus, Kurt Weill (1900-1950) demeure l’un des compositeurs les plus célébrés. On peut s’interroger sur cet engouement, qui n’a pas fléchi depuis les premières chansons de Weill apparues dans L’Opéra de quat’sous, Mahagonny ou Happy end. Est-ce sa rencontre avec le dramaturge Bertolt Brecht qui a insufflé à sa musique ce style si caractéristique, immédiat, épique et souple à la fois ? Ou l’influence du jazz des années 20, qui lui a permis de développer ces rythmes syncopés, ces harmonies crissantes et ce swing inimitable ? Ou encore, ce sont peut-être ces chansons de cabaret nées au tournant du siècle qui, avec humour, férocité et sarcasme, introduisent dans sa musique une distanciation et ce ton nouveau, que le compositeur a gardés tout au long de sa vie ? Profondément ancrées dans leur époque, les chansons de Weill en expriment l’essentiel et la quintessence. Incarnant l’esprit de la première moitié de ce siècle, elles sont aujourd’hui comme une parabole de notre monde contemporain. Reprises avec un simple accompagnement au piano ou dans un arrangement inédit, adaptées au chanteur, à l’effectif instrumental, leur charme demeure grâce à leurs mélodies, simples et entêtantes. La liste serait interminable, de Bing Crosby à David Bowie, de Louis Amstrong à Carla Bley, des Doors à Tony Bennett, de Juliette Gréco aux Young Gods, tous se sont réappropriés un répertoire qu’il n’était pas question de laisser seulement aux chanteurs classiques… Le producteur Hal Willner, grand ordonnateur de ce September songs, à qui l’on doit déjà de mémorables hommages à Thelonious Monk, à Nino Rota, aux musiques des films de Walt Disney et un premier à Kurt Weill (Lost in the stars) en 1985 , tous pour A & M Records, s’est associé cette fois-ci à un réalisateur de cinéma, Larry Weinstein, pour rassembler à nouveau plusieurs artistes autour de la personnalité unique de Kurt Weill. Le résultat de ce September songs n’est pas moins passionnant que le précédent Lost in the stars. La voix de chaque chanteur évolue sur des arrangements somptueux, ciselés dans leurs moindres détails pour un accompagnement savoureux. Bien sûr, les voix éraillées de Nick Cave ou David Johansen nous confortent dans ce style cabaret éminemment associé à Weill et que Tom Waits a largement propagé , mais c’est ailleurs, dans ce September songs, que la surprise surgit : dans le ton plaintif d’Elvis Costello accompagné par le Quatuor Brodsky, dans la voix du compositeur lui-même (!) s’accompagnant au piano et rejoint, près de cinquante ans plus tard, par la contrebasse sensuelle de Charlie Haden, dans cette seconde version, tout aussi étourdissante que la première, de September song par Lou Reed, ou encore le chant halluciné, au charme vénéneux, de Margaret O’Hara.
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