Plutôt que de se compiler pépère, Bashung revisite son œuvre par les voix de traverse, en parfaite compagnie. Pris dans le tourbillon de sa carrière d’acteur, Bashung a dû revoir ses plans en reportant après l’an 2000 la sortie d’un nouvel album et se contenter d’une nouvelle compilation. Connaissant son aversion pour l’inutile, on plonge […]
Plutôt que de se compiler pépère, Bashung revisite son œuvre par les voix de traverse, en parfaite compagnie.
Pris dans le tourbillon de sa carrière d’acteur, Bashung a dû revoir ses plans en reportant après l’an 2000 la sortie d’un nouvel album et se contenter d’une nouvelle compilation. Connaissant son aversion pour l’inutile, on plonge dans ces trente-huit plages en espérant y trouver deux ou trois pépites. La quête sera vite récompensée. Repassée au tamis, la discographie de Bashung se réorganise ici dans un ordre oublieux de la chronologie, malaxe les relectures live (J’écume, L’Apiculteur, J’passe pour une caravane, Rebel ou l’orgasmique Toujours sur la ligne blanche), les versions originales des Petits enfants et de Volutes respectivement effacées des albums Roulette russe et Osez Joséphine lors de leurs rééditions et les archives studios officielles. Les grandes figures de la constellation bashungienne sont une fois de plus convoquées au rendez-vous : l’express pour le nulle part, Joséphine, la petite entreprise, le lavabo, les nuits mensongères, Gaby et son Bijou, Joe, les lacs gelés et l’éternel imbécile chevauchant l’âne.
Mais l’intérêt de cette double compilation est ailleurs : lorsque Bashung cesse de se relire pour tailler dans le vif et rénover ses chansons avec quelques amis. Ce qui s’annonçait alors comme une simple revue d’effectif prend des allures de réunion de famille. La guitare prodige de Marc Ribot et la basse souterraine de Jean-Paul Roy (Noir Désir) s’installent en premier devant le pupitre et revisitent Ostende en apesanteur. Le même complice guitariste reviendra quelques titres plus tard pour rejouer Les Grands Voyageurs spatiotemporels en version blue-grass avant de céder la place à Rodolphe Burger. Sous son influence, Samuel Hall se charpente une nouvelle instrumentation et glisse dans les veines noir ébène du rock baroque imaginé par Kat Onoma, Bashung se réinvente un chant plus théâtral et l’harmonica part en goguette dans le Far-West. Puis M joue la doublure sur le refrain d’un What’s in bird regonflé au violoncelle électrique avant que Noir Désir débarque au grand complet pour un Volontaire râpeux comme un Gun Club. Aussi convaincantes soient-elles, ces rencontres ne supportent pas la comparaison lorsque débarquent Rachid Taha et l’oud enchanteur de Hakim Hamadouche, qui désorientent L’Ode à la vie, le démultiplient sur des gammes inédites, en le surexposant au soleil d’Alger. Visionnaire, cette collaboration célèbre l’union de deux répertoires que tout désignait comme incompatibles et délivre un visa international à un Bashung que l’on croyait condamné au rêve américain.