On vous présente une toute nouvelle rubrique dédiée aux beaux labels. Première étape avec Minimal Wave Records qui n’a jamais dérogé à sa règle numéro 1 en 10 années d’existence : documenter et archiver tout un pan de la musique électronique produite entre la fin des années 70 et le début des eighties.
Si l’intérêt pour les synthés et les boîtes à rythme est si fort aujourd’hui, on le doit beaucoup à la New-yorkaise Veronica Vasicka, fondatrice de Minimal Wave Records. Depuis dix ans, ce label de réédition de musique synth wave du début des années 80, opère un travail méticuleux d’archivage, de pressage et de restauration de bandes magnétiques.
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Glamour dépressif
Le 29 septembre prochain, le label célébrera sa soixantième sortie avec un double LP de Tomo Akikawabaya, The Invitation Of Dead.
Avant cet obscur artiste japonais, c’est avec Autumn, groupe belge orienté vers la musique expérimentale d’avant-garde, les Anglais Circuit 7, les Français Deux ou les Madrilènes de Los Iniciados, que le label de Brooklyn a mis en avant la scène DIY électronique internationale (et essentiellement européenne). C’était l’époque où les machines, devenues accessibles et abordables, évoquaient déjà une certaine idée du futur, en marquant une rupture radicale avec la scène rock (punk inclus) de la fin des années 70.
Jean-Baptiste Guillot, patron du label parisien Born Bad Records, qui fût le premier à programmer Veronica Vasicka au Nouveau Casino au début des années 2000, ne cache pas son admiration :
« Certains labels inondent le marché constamment. Il y a des vraies exhumations, mais très peu de travail de réédition de qualité. J’ai une connaissance pointue de toute cette scène, mais Veronica arrive encore à me faire découvrir de nouveaux artistes. Elle a réussi à apporter quelque chose de frais et glamour dans un secteur de niche assez dépressif, tout en incarnant le courant. Elle est géniale pour ça « .
Expertise nucléaire
Minimal Wave Records a ainsi permis de mettre en lumière un certain nombre d’artistes qui, au début des années 80, n’avaient sans doute jamais envisagé la moindre carrière dans le business de la musique, mais qui, trente ans plus tard, ont pu tourner à nouveau en capitalisant sur leur nom, associé à celui du label de la Big Apple. Andy Oppenheimer, du duo Oppenheimer Analysis, qu’il formait avec Martin Lloyd (décédé en 2013), et dont le LP éponyme fut la première réédition de Minimal Wave, a ainsi pu faire découvrir sa musique à toute une génération de kids obsédés par les machines et le son minimal, non seulement à travers les multiples rééditions de ses disques, mais aussi en live, sous les noms de Oppenheimer MKII et Touching The Void. Tout cela en marge de son job de consultant en contre-terrorisme et d’expert en arme nucléaire (le feu nucléaire étant un des thèmes récurrents dans les productions synth wave et cold wave de l’époque),
JB Guillot, qui en 2006 sortait sur Born Bad la compilation Bippp French Synth Wave 1979-85, voit au-delà du travail salutaire d’archéologie sonore mené par Minimal Wave. Il souligne l’importance de braquer les projecteurs sur les scènes alternatives qui s’opposent à la culture dominante, tant au niveau du son qu’au niveau des modes de vie. Il insiste également sur la nécessité de promouvoir les artistes et les contre-cultures d’aujourd’hui.
« L’intérêt musical devient vite secondaire, les pin-pon d’ambulance ça va cinq minutes. L’objectif de ces rééditions, c’est de montrer qu’à chaque époque il existe une scène underground qui se construit en marge de la culture de masse. Il y a parfois une sorte de révisionnisme de l’histoire dans le travail de réédition : c’est du storytelling ; des groupes moyens, voire mauvais, peuvent très vite être propulsés au rang de groupes cultes. Le corps de métiers d’un label c’est surtout partir de zéro et signer des nouveaux artistes. D’un point de vue économique, on ne peut pas se contenter de ne sortir que des disques de mecs morts ».
Avec Cititrax, filiale de Minimal Wave, Veronica Vasicka tente pourtant de raviver la flamme de la synth pop en signant des groupes actuels, dont nombre d’artistes venus d’Amérique du nord (Silent Servant, Innergaze, Streetwalker…), prouvant ainsi que cette musique 100% européenne, popularisée par les Allemands de Kraftwerk, a su conquérir un public pointu outre-Atlantique.
En attendant de voir quelles orientations nouvelles va prendre Minimal Wave dans les dix prochaines années, vous pouvez toujours réécouter les deux volumes des Minimal Wave Tapes, qui regroupent un paquet de pépites dénichées par Veronica Vasicka, sorties chez Stones Throw en 2010 et 2012.
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