A partir du milieu des années 40, l’Amérique n’a qu’une obsession : le communisme. La hantise de “l’ennemi rouge” se répercute jusque dans certains médias et à Hollywood qui, participeront, pendant près de vingt ans, à cette chasse insensée. Fin juillet 1946. Billy Wilkerson, propriétaire et rédacteur en chef du Hollywood Reporter se confesse dans une […]
A partir du milieu des années 40, l’Amérique n’a qu’une obsession : le communisme. La hantise de « l’ennemi rouge » se répercute jusque dans certains médias et à Hollywood qui, participeront, pendant près de vingt ans, à cette chasse insensée.
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Fin juillet 1946. Billy Wilkerson, propriétaire et rédacteur en chef du Hollywood Reporter se confesse dans une église de Los Angeles. Nerveux, il s’apprête à publier un article problématique, et nécessite l’avis du révérend Cornelius J.McCoy avant de se lancer dans la bataille. Sans hésiter, l’homme d’Eglise lui dit de foncer.
Suivant l’avis de McCoy, et ses convictions conservatrices, Billy Wilkerson publie le 29 juillet un article intitulé A vote for Joe Stalin (« Un vote pour Joseph Staline »), au creux duquel il mentionne une liste de onze noms, onze personnalités du cinéma hollywoodien (dont Donald Trumbo le scénariste de Spartacus de Kubrick et Howard Koch l’un des auteurs de Casablanca) suspectées de flirter avec le communisme.
Le 25 novembre 1947, hôtel Waldorf-Astoria à New York. Les dirigeants de studios et la MPAA (Motion Picture Association of America) se réunissent. De cette rencontre au sommet éclot le fameux Waldorf Statement, déclaration sommant dix professionnels d’Hollywood (« Hollywood Ten ») d’avouer leur adhésion au communisme sous peine de se voir interdire d’exercer leur métier. Ou pis encore : de se faire jeter en prison. Sur les Dix, neuf refusèrent de se prêter aux interrogatoires de la HUAC (House Un-American Activities Commitee)., D’abord sur la ligne de conduite du groupe, le réalisateur Edward Dmytryk (Le bal des maudits) à cause des pressions, sera le seul à revenir sur ses propos, dénonçant au passage un acteur, Leo Penn (le père de Sean).
La cabbale va durer pendant près de deux décennies. Près de vingt ans de traque, de délation, de paranoïa aigüe, de tensions. D’impunité aussi, puisque Hollywood et ses partisans (Wilkerson, le sénateur McCarthy, le patron du FBI John Edgar Hoover…) ont tranquillement bafoué le Ier Amendement de la Constitution américaine censé garantir la liberté de culte, d’expression et d’obédience politique aux citoyens. Au total, plus de 300 professionnels seront blacklistés et plusieurs centaines d’autres, par capillarité, seront concernés.
Outre les travaux universitaires consacrés à la question, quelques films et de trop rares hommages publics, c’est aujourd’hui, 65 ans après la naissance de cet infâme Waldorf Statement, la parole directe des témoins et victimes qui est donnée à entendre.
Réunis à l’initiative du Hollywood Reporter, Norma Borzman, Jean Rouverol, Marsha Hunt, Cliff Carpenter, Walter Burnstein, Lee Grant et Kirk Douglas reviennent ainsi sur les listes noires, leur traversée du désert, leur résistance. Un geste d’une force évidente, réponse au silence de Billy Wilkerson (l’ancien directeur du journal n’assumera jamais sa part de responsabilité) et coup de projecteur saisissant sur une histoire encore trop méconnue.
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