Accusée de véhiculer des images « pédophiles » et « zoophiles », une association d’art contemporain est menacée. Entre menaces téléphoniques et lobbying sur les réseaux sociaux, la fachosphère se mobilise.
Le répit n’aura été que de courte durée. Après l’attaque du monumental Tree et de son auteur, Paul McCarthy, place Vendôme à Paris en octobre dernier, après la dégradation d’une sculpture publique d’Anish Kapoor dans les jardins de Versailles en juin dernier et l’immense polémique que ces prétendus “plug anal” et “vagin de la reine” ont déclenché dans les milieux extrémistes, après enfin, ces dernières années, la multiplication des atteintes physiques ou verbales à l’encontre d’un art contemporain considérée comme dangereux par une frange de plus en plus visible de fachos décomplexés, c’est au tour d’une association installée depuis vingt ans à la Friche Belle de Mai, à Marseille, le Dernier Cri, de faire les frais du réseau d’extrême droite.
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Des menaces téléphoniques
En cause une exposition qui s’est tenue du 13 juin au 27 août dans l’atelier show room de Pakito Bolino, artiste et éditeur de sérigraphies, dessins et mangas volontiers sulfureux et provocants. Etaient présentées les œuvres de deux artistes allemands, Reinhard Scheibner et Stu Mead (réunis au sein du collectif Le Mauvais Œil 23) dont les peintures et illustrations érotiques et grotesques s’inscrivent dans une tradition bédéiste ou illustrative proche d’Hara-Kiri ou de Bazooka.
« Une cabale a été lancée contre Pakito Bolino et contre Le Dernier Cri pendant l’été, la Friche a reçu des coups de fils, la chargée arts visuels à la mairie de Marseille également. Lui-même a reçu des menaces. Les financements publics de la Friche ont été mis en cause alors que Le Dernier Cri touche tout au plus 7 500 euros par an de la ville. S’ils atteignent 20 000 euros par an toutes conventions confondues c’est un miracle », raconte une responsable des associations d’art contemporain de la Friche.
De Fdesouche au FN
Ce sont d’abord des sites d’extrême droite comme celui de Fdesouche qui ont déclenché l’offensive, jusqu’aux élus FN, qui se sont déchaînés ces derniers jours sur Twitter et les réseaux sociaux pour dénoncer une “expo pédopornographique”, mais aussi, tant qu’on y est zoophilique et sataniste, à l’image de ce message posté par Amaury Navarranne, assistant au Parlement européen de Bruno Gollnisch, actuel secrétaire départemental du FN dans les Hautes-Alpes et qui pourrait prendre la tête de liste des Hautes-Alpes pour les régionales : « La Friche » à #Marseille expose du pédo-pornographique et reçoit 455.000€/an de subventions directes de #régionPACA ».
« La Friche » à #Marseille expose du pédo-pornographique et reçoit 455.000€/an de subventions directes de #régionPACA https://t.co/X6vL86VBS2
— Amaury NAVARRANNE (@ANAVARRANNE) 29 Août 2015
« Exposition d' »art » pédophile à la Friche de la Belle-de-Mai, avec l’argent du contribuable via les subventions publiques : la ville de Marseille doit des explications ! », a posté de son côté Stéphane Ravier, Maire FN du 7e secteur de Marseille et Sénateur des Bouches-du-Rhône (13).
Une pétition lancée
D’autres messages, nombreux, émanant des réseaux d’extrême droite et appelant Marion Maréchal Le Pen candidate Paca aux régionales à la rescousse, ont été postés dans la foulée tandis qu’une rumeur circule sur une possible manifestation organisée contre l’exposition, ce samedi à Marseille, alors que se tiendra l’université du FN.
En réaction, une pétition lancée par une étudiante en art et signée depuis par de nombreux acteurs culturels a été lancée.
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