Jeudi 15 novembre, The Soft Moon et Still Corners jouaient sur la scène parisienne du Point Ephémère. On y était, on vous raconte.
Il est à peine 20h30 et Dracula Lewis diffuse ses morceaux comme s’il distribuait les pétards. C’est cotonneux et enfumé. Les spectateurs deviennent amorphes, attentifs mais perdus par des morceaux désincarnés. Le jeune garçon à la longue chevelure sombre est vêtu d’un t-shirt au logo de 28 jours plus tard délivre une dubstep glacée à la sauce coldwave. Son virus toxique agit à la fin du set qui se termine de manière abrupte. Le public a eu le temps de commencer à s’échauffer.
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On retrouve Still Corners peu avant 21h30. Lorsqu’on aperçoit la sirène blonde Tessa Murray sur scène, le temps se fige un peu plus. Avec sa veste à écailles dorées et son chant divin la Londonienne envoûte dès que retentit l’aérienne Endless Summer. Pas de doute envisageable, la chanteuse nous a jeté un sort. La pop éthérée et sensuelle de Still Corners rappelle celles des New-yorkais de Blonde Redhead et d’Au Revoir Simone. Des paysages défilent sur un écran disposé à l’arrière de la scène. Sur Submarine l’atmosphère se fait plus ténébreuse avec des rythmiques à la Deerhunter, avant de s’envoler vers la litanie kaléidoscopique et joviale de Into The Trees. Still Corners livre une pop onirique et protéiforme. Le groupe anglo-américain touche sa cible sans se forcer, avec ascendant.
On se faufile dans le Point Ephémère bondé pour ne rien louper de la gifle que s’apprêtent à nous assener Luis Vasquez et sa clique. Sur le mur noir à gauche de la scène est écrit « You’re nobody t’ill someone kills you », célèbre punchline du rappeur Notorious Big. Les lumières s’éteignent, trois longues minutes de quasi-silence s’intallent – « C’est John Cage ? » raille mon voisin – avant que le concert ne commence. Vasquez débarque à 22h25 et entame Die Life. On se pince pour vérifier notre rigidité cadavérique.
Circles et Into The Depths plongent l’audience sous la banquise. Les lumières stroboscopiques s’accordent à la perfection avec l’odyssée lugubre que nous offre les Californiens. We have few more songs for you dit-il sérieusement à la fin de la troisième chanson, le public lui rit au nez. Place à Dead Love – hantée par le fantôme de Ian Curtis – pour se faire pardonner.
Depuis 25 minutes le bassiste demeure imperturbable, Vasquez est quant à lui déchaîné, il crie plus qu’il ne chante. Le Californien fait gémir sa guitare, la tient comme une arme qu’il secoue dans tous les sens durant l’énergique et torturée Zeros. Voix d’outre-tombe, guitares tordues et désaccordées, claviers caverneux : on retrouve toute la panoplie du père spirituel Robert Smith. Impossible de trouver une chanson de The Soft Moon qui ne serait pas empreinte de l’album Pornography de The Cure. De ce point de vue là, le summum reste atteint avec Insides, étouffée par l’héritage de Smith et de Curtis. Ce qui n’empêche pas la messe noire de fonctionner. Les spectateurs sont happés par le magnétisme que dégage Vasquez. Il y a de quoi : le concert se clôt en apothéose sur la tribale et obsédante Want.
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