Aux Etats-Unis, les homosexuels font l’apprentissage d’une sexualité sans la peur du VIH grâce au Truvada, un traitement préventif.
C’est l’histoire de l’autre pilule bleue du sexe. Pas celle qui aide à bander, celle qui doit prévenir du VIH : le Truvada. Ce cocktail d’antirétroviraux produit par les laboratoires Gilead Sciences, permet de protéger les personnes séronégatives lors de rapports à risque.
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Plusieurs études ont déjà démontré le très haut niveau de protection de cette nouvelle stratégie de prévention appelée “prophylaxie pré-exposition” (ou PrEP) auprès des hommes ayant des relations sexuelles avec des hommes (HSH). Une prise quotidienne, ou avant et après un rapport sexuel non protégé, réduirait de 86 % le risque d’infection, selon un essai clinique français baptisé Ipergay et mené par l’Agence nationale de recherche sur le sida. Pour le professeur Molina, chef du service des maladies infectieuses et tropicales à l’hôpital Saint-Louis de Paris, “il est peu probable que nous ayons un jour un vaccin qui protège à ce niveau-là”.
Aux Etats-Unis, le Truvada a été approuvé par la FDA (Food and Drug Administration) en 2012. A l’époque, des voix se sont élevées pour dire que sa commercialisation allait encourager certains homosexuels à délaisser les moyens de prévention existants, multiplier les relations sexuelles sans capote pour se transformer en“Truvada Whores” (“salopes du Truvada”). “C’est du slut-shaming, estime Mark, un jeune gay californien. On veut juste prendre notre sexualité en main. Pas baiser à tout-va !”
A San Francisco, les nouvelles infections ont chuté de 30%
Trois ans après sa mise sur le marché, cette PrEP n’a pas bouleversé la sexualité des homos américains. Pour Brontez, jeune musicien gay d’Oakland, la pilule de Gilead n’a pas changé l’attitude des homosexuels : “Le Truvada n’a pas transformé la baie de San Francisco en gigantesque orgie ! Mes amis sous PrEP ne sortent pas tous les soirs pour chercher du sexe. Et quand je drague en ligne, la majorité des profils annoncent toujours ‘safe sex only’.”
A San Francisco, les nouvelles infections ont chuté de 30 % depuis 2012, selon le département de la santé publique de la ville. L’objectif de parvenir à zéro contamination semble désormais à portée de main.
“Sur les applis de drague comme Grindr ou Scruff, on voit se multiplier les profils de mecs annonçant On PrEP”, constate Olivier, un Français expatrié à New York. “Mais ça n’est pas parce que les mecs veulent faire du sexe sans capote !, répond Cooper, lui aussi new-yorkais. Seulement qu’ils veulent avertir les autres qu’ils sont safe et séronégatifs.”
La PrEP n’est pas une “capote chimique”
Mark est sous Truvada depuis un an. Le traitement, qui coûte environ 1200 dollars par mois, est pris en charge par son assurance maladie : “II reste 200 dollars à sortir de ma poche que Gilead prend à sa charge la première année.”
Quand on lui demande si le comprimé bleu a changé sa façon de baiser, il répond sans détour : “Je mets une capote quasi systématiquement, mais si un soir j’ai trop bu ou si pour je ne sais quelle autre raison je ne mets pas de préservatif, ça m’évite de me dire que je dois faire confiance à un mec qui ne connaît peut-être pas son statut sérologique. Je préfère faire confiance à la PrEP !”
Reste que la PrEP n’est pas une “capote chimique”. Si elle réduit les risques d’infection au VIH, elle ne protège pas des autres infections sexuellement transmissibles comme la gonorrhée, la syphilis ou l’hépatite C. En France, malgré ces signaux encourageants et la pression des association de lutte contre le sida, l’utilisation d’un traitement anti-VIH par des personnes séronégatives de manière préventive n’est toujours pas autorisée.
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