Quelle est ta musique de prédilection ? J’aime beaucoup la musique électronique des années 80 comme le groupe allemand DAF, Throbbing Gristle qui a “inventé” la musique industrielle, Cabaret Voltaire, ou encore Einstürzende Neubauten. J’aime aussi beaucoup tout le travail solo de Blixa Bargeld. Comment as-tu découvert cette musique ? Il y a toujours un […]
Quelle est ta musique de prédilection ?
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
J’aime beaucoup la musique électronique des années 80 comme le groupe allemand DAF, Throbbing Gristle qui a « inventé » la musique industrielle, Cabaret Voltaire, ou encore Einstürzende Neubauten. J’aime aussi beaucoup tout le travail solo de Blixa Bargeld.
Comment as-tu découvert cette musique ?
Il y a toujours un lien entre les choses. J’ai découvert Neubauten à 17 ans grâce à un ami qui est musicien. Un soir, il a mis une chanson qui s’appelle Salamandrina. J’ai adoré, je me suis mise à acheter tous les disques, et j’ai fini par devenir amie avec Blixa. J’ai aussi rencontré Genesis P-Orridge, le fondateur de Throbbing Gristle, qui m’a ouvert à des tas d’univers musicaux. Une rencontre amène à une autre. Le Kirk du titre de mon livre existe vraiment : c’est un New-Yorkais qui m’a fait découvrir les New York Dolls, et aussi la scène punk-rock de Detroit avec des groupes comme les Gories ou les Demolition Doll Rods.
Qu’est-ce qui te touche précisément dans cette musique ?
L’authenticité de la recherche : au début des années 80, la musique électronique n’en était qu’à ses balbutiements. Il y avait quelque chose de primitif, d’authentique qui me touche beaucoup. Laurie D., le garçon qui a fait la musique de mon film, a été l’un des premiers à importer la techno en Italie en 1989, quand cette musique paraissait effrayante. Il a passé tellement de temps enfermé dans son studio qu’il est devenu complètement fou. Il m’a fait connaître le premier instrument électronique, le Theremin. La plupart des gens qui ont travaillé avec cet instrument sont devenus fous, à commencer par Brian Wilson des Beach Boys. Aujourd’hui, beaucoup de groupes l’utilisent, de Radiohead à Add N To (X) en passant par Mercury Rev, mais au départ, on utilisait le Theremin pour bruiter les films d’horreur : « Ouh, ouh, ouh ! » Je rêve de faire un film sur la vie de l’ingénieur qui l’a inventé : il a été kidnappé par le KGB aux Etats-Unis. Ils l’ont ramené de force en URSS pour le forcer à travailler sur la bombe nucléaire. Il est devenu fou lui aussi : ils ont dû lui faire des électrochocs…
En dehors du rock « primitif », qu’est-ce que tu écoutes ?
Elvis Presley revient souvent sur ma platine, tout comme Charlie Feathers, Gene Vincent, Eddie Cochran, les Everly Brothers… J’ai découvert que ma fille qui a tout juste 2 mois adore les Everly Brothers. Mais son disque préféré pour l’instant, c’est Yellow Submarine. Du coup, j’ai pris une compilation des Beatles avec moi à Paris, que je lui passe en boucle. Elle est aux anges. Et ça me permet de redécouvrir les Beatles. J’avais un peu associé ça à mes parents, et là je découvre qu’en fait, c’est vraiment bien. Sinon, mon dernier coup de c’ur est An Electronic Storm par White Noise. Ça date des années 60 : je suis sûre que Radiohead et Björk leur ont tout piqué.
Passons à la littérature : tu cites souvent Dante…
Bien sûr, je suis italienne, et il a inventé notre langue. On nous le fait lire à l’école, mais évidemment, si on veut découvrir le vrai Dante, il vaut mieux le lire par soi-même. Ce qui me touche dans son uvre, c’est l’idée d’un objet du désir qui soit inatteignable. Pour lui, c’était Béatrice qui était morte. Du coup, il ne pouvait qu’écrire. C’est aussi la raison pour laquelle j’adore Apollinaire : les poèmes qu’il a écrits à Lou pendant la guerre. C’est l’absence de l’autre, aggravée par les horreurs de la guerre, qui l’a conduit à chercher tant de beauté dans la poésie. L’amour interdit, empêché, à un certain moment, ce n’est plus de l’amour, c’est l’idée de l’amour, mais ça peut être encore plus fort. Quand tu es amoureux et que tout se passe bien, pourquoi perdre son temps à écrire ? Dans ce cas-là, mieux vaut aller se promener avec son amour.
Tu recherches toujours ce sujet en littérature ?
Oui pour Dostoïevski ou le Victor Hugo de L’homme qui rit. Mais j’aime aussi beaucoup Céline, surtout Mort à crédit, et on ne peut pas dire que ce soit son sujet. Sinon, j’aime beaucoup Flannery O’Connor : je pense qu’Harmony Korine s’est beaucoup inspiré de cette Amérique d’obsessions religieuses, de petites villes dans des villages, d’esprits étroits.
Et tes films préférés ? Tu cites souvent Freaks de Tod Browning.
Oui, j’adore tous les films sur les monstres. Les films de Jodorowski par exemple, même si parfois c’est un peu too much pour moi. J’adore aussi Spider Baby de Jack Hill avec Lon Chaney Jr. Dès qu’il y a un estropié ou un nain, je suis ravie. Je me reconnais à chaque fois dans les personnages de monstres. Mais j’adore aussi voir des films muets : quand je préparais Scarlet Diva, j’ai revu beaucoup de Dreyer, Pabst, Fritz Lang, ou Tziga Vertov. J’adore aussi le Napoléon d’Abel Gance, d’une liberté folle : il inventait le cinéma, il pouvait tout se permettre.
*
Actrice, réalisatrice et aujourd’hui auteur, Asia Argento publie Je t’aime Kirk, un attachant roman aux éditions Florent Massot.
{"type":"Banniere-Basse"}