On ne parle pas assez de Loren Mazzacane Connors, de sa manière tout étriquée et douce de faire suinter et pleurer sa guitare. Guitariste depuis trente ans, découvert il y a une poignée d’années, il sort des albums à la pelle, qui parfois se retrouvent dans les bennes de New York. Mazzacane Connors fait du […]
On ne parle pas assez de Loren Mazzacane Connors, de sa manière tout étriquée et douce de faire suinter et pleurer sa guitare. Guitariste depuis trente ans, découvert il y a une poignée d’années, il sort des albums à la pelle, qui parfois se retrouvent dans les bennes de New York. Mazzacane Connors fait du blues, pour des gens qui n’en ont rien à faire du blues, qui n’écouteront jamais les jérémiades de John Lee Hooker, les sornettes de Robert Johnson ou les bavardages de Jimi Hendrix. Sa musique s’écoute comme une prière, une respiration difficile, à la manière d’un accès de folie intérieure, intime. Ce type-là, on ne le partage qu’avec ses meilleurs amis, ceux qui comprennent toutes les peines, toutes les larmes, toutes les déchirures.
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Chacun de ses disques est précieux, et les deux plus récents le sont tout autant que les précédents. Tout d’abord, le disque réalisé avec sa compagne, Suzanne Langille. Rétrospective de morceaux introuvables, qu’ils ont enregistrés ensemble, à la fin des années 80, 1987-1989 est essentiellement constitué de morceaux traditionnels ou de blues obscurs : TB sheets, Sometimes I feel like a motherless child, All the pretty little horses, Blue ghost blues. En chantant, Suzanne Langille pousse sa voix, fragile et caverneuse, pleine de jolies faiblesses, tandis que Mazzacane Connors cajole sa guitare et fait se réverbérer quelques accords désincarnés, squelettiques. Dans son jeu, jamais d’emphase, jamais d’enthousiasme gras. Tout se déroule en demi-teintes, en non-dits atmosphériques. Ici, « ça » ne « joue » pas : on se contente de respirer, doucement.
Portrait of a soul, louable initiative du label français FBWL, rend compte du Loren Mazzacane Connors actuel : plus sombre mais aussi plus précis, plus intransigeant, aphone qui laisse sans voix. Mazzacane Connors vit à New York. Il est malade et cela s’entend : chaque soir, seul, il me fait pleurer.
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