Portraitiste des troubles de l’adolescent, Pierric Bailly enchante la rentrée avec un conte planant, une épopée fantastique gorgée de références pop.
En deux romans, Polichinelle (P.O.L, 2008) et Michael Jackson (P.O.L, 2011), Pierric Bailly s’est imposé comme le héraut d’une jeunesse française rurale et un peu désorientée. De cette génération poussée en pavillons de crépis, élevée au rap et au porno en ligne, l’écrivain jurassien raconte les tendres désillusions, la peur de l’engagement et le difficile passage à l’âge adulte.
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A ces presque trentenaires anti-bling aux élans régressifs, à ces adulescents (contraction marketing d’adulte et d’adolescent), il a donné une voix singulière, séquencée comme les textes de hip-hop et nourrie de culture pop. Aujourd’hui, il revient avec L’Etoile du Hautacam, un troisième roman au faux air de conte perché dans lequel il explore l’imaginaire de l’enfance et en détourne les figures mythiques et les légendes immortelles.
Un Disneyland perché pour touristes
Il était une fois Simon Meyer. Quadra quitté par son amour de toujours et scénariste raté, Simon habite seul un petit appartement à Bagnolet. A l’occasion d’un enterrement, il retourne à Stellange, son village natal situé dans une vallée de la Fensh inventée, où il a une révélation : il va revenir s’établir dans la maison familiale, tenter “le retour aux sources”, loin de Paris, des déceptions et des missions d’intérim.
Mais au détour d’un chapitre, à la faveur d’un accident de voiture, le fantastique s’invite dans le récit : Stellange, qui n’était qu’une bourgade banale, devient alors L’Etoile du Hautacam, un village flottant à quinze kilomètres au-dessus des têtes, relié au sol par une tour de béton armé. 365 jours d’ensoleillement par an, des villas de stars, des hôtels de luxe et des magasins de souvenirs : L’Etoile n’a plus rien de pittoresque, c’est un Disneyland perché pour touristes en bermuda et bob à lanière.
Le pouvoir de l’imagination
Pierric Bailly fait le pari de la fantaisie. Il pioche et réinvente les décors, les personnages et les histoires qui ont bercé notre enfance : il y a un château transformé en résidence étoilée, un ogre cruel sous les traits d’un entrepreneur avide, des sbires agressifs qui se lancent dans des courses-poursuites en voiturettes, une princesse vendeuse de sandwichs et même un homme-coq adulé par une (basse) cour de petites poules.
A l’univers de Walt Disney et des contes de Grimm ou de Charles Perrault, l’auteur ajoute les références générationnelles de cette jeunesse dont il continue ainsi de se faire l’écho : on retrouve l’onirisme d’Hayao Miyazaki, le rythme entraînant des blockbusters hollywoodiens, l’art acidulé de Muraki ou l’electro nineties de The Prodigy.
Avec ce récit moins satirique qu’épique, Pierric Bailly ose le roman d’aventure à grand spectacle avec péripéties rocambolesques et héros farfelus. Loin de la littérature sociale de ses deux premiers ouvrages, il célèbre le pouvoir de l’imagination et signe un divertissement réjouissant, pour les enfants de 7 à 77 ans.
L’Etoile du Hautacam (P.O.L), 336 pages, 17 €
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