Le cinéaste et l’acteur publient leurs premiers romans. Un symptôme d’une nouvelle mode hollywoodienne, où de plus en plus d’artistes passent à l’écriture.
Depuis quelques années, le phénomène enfle entre les deux côtes américaines : pour s’offrir les signatures des stars d’Hollywood, les intellos new-yorkais mettent de plus en plus souvent la main au portefeuille. En septembre, la comédienne Amy Schumer recevait une avance de 9 millions de dollars du grand éditeur Simon & Schuster pour son projet de livre – un recueil d’essais autobiographiques. Récemment, les jeunes étoiles de la télé américaine Lena Dunham et Aziz Ansari ont empoché respectivement 3,7 et 3,5 millions de dollars d’avance pour des livres aux ventes variables. Produits dérivés de leur succès sur petit et grand écran, ces ouvrages leurs permettent de poursuivre à l’aise – et en long – leur analyse des mœurs contemporaines. Last but not least, David Lynch serait en train d’écrire ses mémoires.
Plus rares sont ceux qui osent s’aventurer dans le champ périlleux de la fiction. Alors que les plus timorés tentent leur chance au rayon des livres pour enfants (Julianne Moore, Madonna, Jamie Lee Curtis, Spike Lee…), les plus inspirés s’essaient au roman. Délai de traduction oblige, en cette rentrée hivernale, deux poids lourds d’Hollywood font en France leurs premiers pas en littérature.
Les vannes fermières de Duchovny
David Duchovny, le Fox Mulder de la série X-Files, a décidé de révéler au monde son côté potache avec Oh la vache !. Son héroïne bovine, Emma, comprenant son destin de steak, décide de s’enfuir pour l’Inde. Elle forme dans cette aventure un attelage cocasse avec une dinde qui fera escale en Turquie (en anglais, “dinde” se dit “turkey”) et un cochon qui ne rêve que de la terre casher d’Israël.
Pas de doute, Duchovny s’est éclaté en vannes fermières, et son traducteur, Claro, semble s’être bien amusé aussi. Mais le roman dépasse difficilement le stade de l’anecdote, et on peut franchement questionner l’emprise du star system hollywoodien sur le milieu de l’édition.
Cronenberg revient à ses premières amours trash
Autre ambiance chez David Cronenberg avec Consumés. Le réalisateur de Crash et de Vidéodrome, assagi au cinéma depuis quelques films, revient à ses premières amours trash et file sa passion intacte pour le malsain, le dérangeant et le bizarre.
Au prétexte d’une enquête menée à travers le monde sur le meurtre cannibale d’une célèbre philosophe française, le Canadien renoue avec ses vieilles obsessions : fétichismes, désirs sexuels inavouables, amputations, névroses et maladies vénériennes rarissimes se disputent ici notre dégoût fasciné.
Ecrivain visuel et provocateur, Cronenberg finit en queue de poisson mais signe un roman tout à fait digne de ses films et de son imaginaire, l’un des plus marquants du cinéma contemporain.
Oh la vache ! de David Duchovny (Grasset), traduit de l’anglais (Etats-Unis) par Claro, 216 pages, 16,90 €, en librairie le 13 janvier
Consumés de David Cronenberg (Gallimard), traduit de l’anglais (Canada) par Clélia Laventure, 372 pages, 21 €