Lauréate 2015 des Audi talents awards dans la catégorie « court métrage », la réalisatrice Magali Magistry capte avec délicatesse des fragments d’existence de personnages en quête d’une alternative.
Après Cinderela, tourné au Brésil et présenté en 2011 au festival Sundance, Magali Magistry télescopait dans Vikingar des mythes et enjeux contemporains à travers le portrait sensible d’un viking moderne islandais. Primé en 2013 à la Semaine de la critique du festival de Cannes, le court métrage faisait également partie de la sélection des Césars 2015.
Avec Expire, son prochain film réalisé avec le soutien des Audi talents awards, Magali Magistry investit un nouveau champ cinématographique : le film d’anticipation.
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Quel a été votre parcours ?
Avant de réaliser des courts métrages, j’ai d’abord commencé par la photographie. Cela a forgé mon approche du film, très visuelle, et mon travail de l’image ; les cadres et les textures étant par exemple très importants pour moi. J’ai ensuite dérivé à la fac vers l’art contemporain et la philosophie avant de revenir vers le cinéma, un médium qui m’intéresse beaucoup pour sa dimension d’art total et son aspect collaboratif.
Extrait du court métrage Cinderela, 2011
Vous avez présenté aux Audi talents awards un projet de court métrage intitulé Expire. De quoi s’agit-il ?
Expire raconte l’histoire d’une jeune fille qui vit à la campagne et rêve d’ailleurs, cherche à s’échapper de son quotidien, comme n’importe quelle adolescente. Mais le film se déroule dans un futur proche, où le monde est ultra pollué et recouvert d’un brouillard toxique. Un peu comme si le smog que l’on voit dans certaines villes de Chine ou même à Paris devenait la norme et était si dense qu’il était impossible de respirer à l’extérieur. Les plantes suffoqueraient et les hommes devraient obligatoirement sortir avec un masque à oxygène.
Je ne souhaite pourtant pas être dans un discours fataliste : bien que ce futur paraisse dystopique, le film se dirige vers une note d’espoir. C’est davantage un constat terrible qui pose la question : comment conserver son humanité dans une telle situation ? La jeune fille, avec son énergie et ses désirs adolescents, parvient à ré-enchanter le monde autour d’elle.
Ou en êtes-vous de la production du film ?
Je suis en train de peaufiner l’écriture du scénario, tout en continuant à nourrir le projet de mes lectures et de références visuelles. J’avais une idée assez évanescente lorsque j’ai décidé de participer aux Audi talents awards et le concours m’a donné un cadre pour la cristalliser. Grâce à ce soutien, j’espère débuter le tournage en Bretagne en février 2016, pour une sortie en cours d’année. J’ai vraiment hâte de passer à une phase de mise en production beaucoup plus collaborative.
De quoi vous inspirez-vous justement pour imaginer cet univers d’anticipation ?
Je lis beaucoup de choses sur le réchauffement climatique et l’agroécologie, des questions devenues malheureusement des thématiques saillantes de notre société. Je fais aussi des recherches du côté des technologies intégrées au quotidien car je voudrais imaginer pour le film des outils qui aideront les personnages à vivre dans ce monde, à communiquer ou à se repérer dans le brouillard.
Comme Expire, vos deux films précédents, Cinderela et Vikingar, étaient déjà très intimistes, se focalisant sur le quotidien d’un personnage principal pour révéler des problématiques contemporaines…
En effet, je m’intéresse surtout à l’épopée émotionnelle d’une personne. Mes films suivent souvent une situation dans laquelle évolue le personnage principal. Une tranche de vie qui permet de comprendre autre chose dans un contexte plus large. Vikingar par exemple questionnait une masculinité désenchantée : qu’est-ce qu’être un héros pour sa famille aujourd’hui ?
Trailer de Vikingar, 2013
Après la fable historique tournée en costumes pour Vikingar, vous passez, avec Expire, à la science-fiction. Comment vous appropriez-vous ces genres cinématographiques ?
Mes films naviguent entre le film de genre pur et un cinéma naturaliste. Utiliser les codes du genre dans un contexte différent et intime, faire un pas de côté dans la réalité, permet de créer une familiarité mais également un sentiment d’inconfort. Il faut trouver le juste équilibre pour ne pas tomber dans la caricature ou l’archétype. Filmer un combat à l’épée ou se frotter aux effets spéciaux me permet aussi de tester ma résistance, d’affûter mon savoir-faire et mon regard de réalisatrice. Et puis c’est excitant d’amener d’autres problématiques dans des genres trop fréquemment considérés comme masculins.
Retrouvez l’actualité des Audi talents awards sur le site Emergence.
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