Enfants sauvages chez Minetaro Mochizuki, très jeunes filles en fleur pour Kazu Yuzuki : deux recueils à la grâce sublime.
Spécialiste du manga d’auteur et adulte, Le Lézard noir publie cet automne deux mangas remarquables dans des genres très différents. Chiisakobé, prévu en quatre tomes, est tiré d’un roman de Shugoro Yamamoto, auteur adapté au cinéma par Akira Kurosawa et Takashi Miike.
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Shigeji, jeune maître charpentier renfermé et fier, revient à Tokyo remettre sur pied l’entreprise familiale détruite par un incendie qui a également tué ses parents. Une amie d’enfance, Ritsu, arrive pour lui servir de gouvernante, emmenant avec elle cinq orphelins teigneux dont l’orphelinat a brûlé dans la même tragédie.
Mi-attachants, mi-sauvages
Sur un rythme lent et posé, Minetaro Mochizuki raconte l’histoire de trois reconstructions intimement liées : celle de Shigeji après le drame, celle de l’entreprise et celle des enfants, mi-attachants, mi-sauvages, petits cousins des gamins de Sunny de Taiyou Matsumoto. Deux beaux portraits de femmes, celui de Ritsu et celui d’une jeune fille aisée qui vient faire la classe aux enfants, se mêlent à ce récit que Mochizuki chorégraphie comme un ballet.
Son trait simple et clair, particulièrement dépouillé, avec des gros plans qui mettent l’accent sur les attitudes et les corps, donne une grâce épurée à l’ensemble et sied à merveille aux questions que l’auteur soulève ici – qu’est-ce que devenir adulte et responsable.
Dans la chaleur de l’été
Mirages d’été est un recueil de récits courts de Kazu Yuzuki, auteur de la revue gekiga Garo, parus dans les années 80. Il y met en scène des fillettes, des préados qui s’ennuient dans la chaleur de l’été. Entre mesquineries, jalousies et amitié, elles passent le temps en rêvant, en se chamaillant, en allant nager ou voir des films au cinéma. Elles s’éveillent à la sexualité, découvrent par petits incidents le monde des adultes qu’elles aimeraient déjà intégrer.
La langueur est de mise, les jeux sont parfois ambigus, voire érotiques et parfois très pervers. Mais chez Kazu Yuzuki, il n’est pas toujours possible de savoir où s’arrête la réalité, où commence le fantasme. Un climat étrange et irréel baigne chaque récit. Les décors fouillés, à la végétation luxuriante et moite, presque psychédélique, ajoutent à l’ambiance fantastique. Comme pour mieux caractériser cette période d’entre-deux, mouvante, insaisissable, qu’est l’adolescence.
Chiisakobé vol. 1 de Minetaro Mochizuki (Le Lézard noir), traduit du japonais par Miyako Slocombe, 208 pages, 15 €
Mirages d’été de Kazu Yuzuki (Le Lézard noir), traduit du japonais par Miyako Slocombe, 200 pages, 21 €
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