Des Guignols de l’Info au plateau de Millevaches, de Cocao Fernandez à Osama Ben Laden, de Philippe Garnier à George W. Bush, du Havre à Felletin, revue de quelques idées pas très claires, mal enchaînées et tirées par les cheveux. En attendant le génocide des dindes.
Je me souviens d’une époque pas si lointaine où ce journal, pour faire son malin, s’était mis en tête d’enterrer Les Guignols de l’Info sous prétexte qu’une partie de ses auteurs ressentait des envies d’ailleurs. Ce qui rime toujours, en télévision, avec sous les projecteurs’. Nous étions alors quelques-uns à vouloir accorder aux marionnettes le bénéfice du doute, une sorte de présomption d’innocence pour la grosse déconne. Nous avions alors réussi à faire passer, lors d’un épique débat au politburo, une motion de censure : faire accompagner cette affirmation au venin ? La fin des Guignols’ ? d’un point d’interrogation. La fin des Guignols ??, donc (rires) ? On devrait également faire ça pour nos référendums de fin d’année, histoire de laisser macérer des livres longs en bouches, afin de laisser se dégonfler des films baudruches ou de prendre la distance nécessaire avec des disques aux charmes trompeurs. ?Les meilleurs disques, films et livres de l’année ? ?, donc.
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La preuve que Les Guignols ne sont pas morts, c’est que la pression revient, puissante et sournoise. Un ami qui veut du bien à la poilade, proche des auteurs des Guignols, me racontait récemment que le téléphone rouge s’était remis à sonner. Le téléphone rouge, c’est celui sur lequel la Présidence ordonne qu’on cesse de montrer Bernadette en train de se pignoler sous le sac à main : celui des coups bas qui viennent d’en haut. Là, visiblement, ce n’est pas le politique qui s’active au bout du fil, mais les moralistes médiatiques. On accuse ainsi les auteurs des Guignols d’être une sorte d’anti-France contre les va-t’en-guerre et, plus précisément, de rendre Osama Ben Laden sympathique. Je me demande si CNN reçoit des coups de téléphones de pays arabes honteusement cocufiés et humiliés par les promesses de Bush Le Père lors de la guerre du Golfe, demandant immédiatement à la chaîne de propagande de cesser de rendre Bush Le Fils aussi sympathique.
Tellement sympa et inoffensif que même les chiens de Floride peuvent voter pour lui. Car on sait comment, désormais, il est devenu l’homme le plus puissant de la terre, en volant à la démocratie l’Etat de Floride, et donc les Etats-Unis indécis. C’était ce week-end une petite brève dans la presse américaine : Wendy Albert, 62 ans et résidente en Floride, avait réussi à faire inscrire sur les listes électorales, avec mention Républicain’, un dénommé Cocoa Fernandez. Les Corses peuvent se rhabiller avec leurs listes électorales ressemblant furieusement aux frontons des pierres tombales de leurs cimetières : Cocoa Fernandez est vivant, lui. Mais c’est un caniche. Le pire, c’est que Wendy Albert ne sera même pas poursuivie pour fraude électorale et le vote du caniche validé. Apprenons à nous méfier si, sur les prochaines listes électorales corses, apparaissent les noms Médor Paduccini ou Milou Santucci.
?L’art a besoin du peuple?. C’est une banderole parmi des milliers, en plein centre-ville du Havre, lors d’une gigantesque mobilisation de mai 68. Mais du haut de sa maladresse, de sa condescendance naïve (elle est signée des étudiants des Beaux-Arts), elle justifie à elle seule qu’on se penche sur le livre Le Havre, 1900-2000, un siècle de vie. Car l’histoire du Havre, c’est aussi celle de Hambourg, celle de Liverpool ? avec Little Bob Story en lieu et place des Beatles, certes. Une histoire de paquebots, qui font que l’Amérique semble plus proche, voisine. Une histoire de disques, aussi, qui arrivent forcément plus vite, plus tôt ici, entraînant dans leur sillon les vocations : musiciens, journalistes, promoteurs, disquaires’ En quelques lignes, c’est toute une histoire du rock français qui est ainsi scrutée par le petit bout de la lorgnette : des labels mythiques (L’Invitation au Suicide ou Closer) à cette boutique de disques entrée dans la légende pour avoir été la Voice Of America tenue par Philippe Garnier (Crazy Little Thing), cette épopée a valeur d’exemple ? universel. On y lit notamment que ?Le rock, au Havre, constitue un sursaut d’autonomie locale dans une ville machine pilotée de l’extérieur depuis la reconstruction. C’est aussi l’expression spontanée d’une jeunesse qui rejette l’ennui d’une époque et de l’usine. Autour du rock se constituera une image éphémère du Havre, plus américaine et plus rebelle que la version officielle. ? De Fevret à JL Marre, de Garnier à Soligny, on ne remerciera donc jamais assez le communisme.
On ignore s’il existe une scène rock sur le plateau de Millevaches : on connaît juste un centre d’art contemporain gonflé sur le lac de Vassivières et un fanzine rock précis et enflammé à Felletin, un peu plus loin. Mais il existe désormais un court-métrage ahurissant sur cette terre à tourbe adorée : Millevaches Expérience, documentaire psychédélique et possédé. C’est Canal Plus qui le diffuse parfois, dans le cadre de sa séquence Surprises. Si la BO avait été signée Jean-Louis Murat, ç’aurait été mon film de l’année. Sans point d’interrogation.
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