Sortis intacts du désert, les Jungle Brothers ignorent l’air du temps pour malaxer un hip-hop toujours sage et moelleux. Le hip-hop a 20 ans. A l’aune d’une vie humaine, l’âge de tous les possibles où l’identité se cherche encore. Bienveillants, les Jungle Brothers, dans l’arène depuis dix ans, expliquent ainsi le matérialisme et l’irresponsabilité de […]
Sortis intacts du désert, les Jungle Brothers ignorent l’air du temps pour malaxer un hip-hop toujours sage et moelleux.
Le hip-hop a 20 ans. A l’aune d’une vie humaine, l’âge de tous les possibles où l’identité se cherche encore. Bienveillants, les Jungle Brothers, dans l’arène depuis dix ans, expliquent ainsi le matérialisme et l’irresponsabilité de la majorité des rappers actuels : « Le hip-hop est en train de quitter l’adolescence pour entrer dans l’âge adulte. Il est encore très attaché à ses fantasmes puérils : avoir du blé, s’envoyer en l’air avec tout ce qui bouge et rouler en BMW. Bientôt, il comprendra la nécessité de s’attacher à une femme et de construire un foyer solide. Dès lors, l’attitude changera. » Cette confiance reflète parfaitement la mentalité de ces vétérans que les passages à vide n’ont réussi ni à déboulonner ni à dessécher. Afrika Baby Bam, Mike G et Sammy B n’ont même pas eu à vieillir en sagesse : ils l’étaient déjà au premier jour, avant les riches heures des Native Tongues, puisqu’ils ne fondèrent ce collectif avec De La Soul et A Tribe Called Quest qu’après la sortie de leur premier album en 88, ralliant ces deux groupes balbutiants à leur philosophie positive.
Leur traversée du désert silence radio depuis le flop du troisième album en 1993, assorti en sous-main de vicieux coups bas de l’industrie n’a pas entamé leur fraîcheur et leur créativité mais une rancoeur justifiée, difficilement contenue, exsude de ce nouvel album (Moving along, Handle my business, Blackman on trax). Une légère ombre au tableau vite balayée par l’optimisme moelleux de ce nouveau pavé inspiré dans le marécage rappologique. Car s’ils ne peuvent se garder d’une certaine nostalgie, rappelant opportunément les règles du jeu originel, le trio ne donne jamais dans le passéisme geignard, opposant toujours le discernement à l’ignorance, l’espoir à l’affliction et la célébration au blasphème. Fidèles à eux-mêmes, ils ne sacrifient pas non plus leur style musical aux canons en vigueur de la déglingue du Wu-Tang aux sirupeuses digressions R&B , poursuivant sans accroc leur bonhomme de chemin mélodique avec une tonalité old-school renouvelée, ajustée souplement à l’ère sonore.
Du sautillant Jungle brother au lumineux Moving along, en passant par le sensuel Changes et l’indolent Brain, cet album gagne sans peine l’auditeur à sa poésie douce-amère. D’autant que cette contagieuse brise estivale nous vaut également le freestyle nerveux de How you want it we got it, nouvel hymne des Native Tongues all stars et un bonus-CD mixé, opportun rappel historique signé du légendaire DJ Red Alert.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
{"type":"Banniere-Basse"}