Adopté par une Angleterre au hip-hop jovialement perverti, ce New-Yorkais y enseigne la belle histoire de la old-school. C’est d’abord ce nom, insolite, qui sauta aux yeux, quelques jours avant que ce son, insolent, ne sautille aux oreilles. En un Dead husband sinueux et jouisseur, le New-Yorkais repeignait en rose et noir un département un […]
Adopté par une Angleterre au hip-hop jovialement perverti, ce New-Yorkais y enseigne la belle histoire de la old-school.
C’est d’abord ce nom, insolite, qui sauta aux yeux, quelques jours avant que ce son, insolent, ne sautille aux oreilles. En un Dead husband sinueux et jouisseur, le New-Yorkais repeignait en rose et noir un département un rien poussiéreux de notre discothèque, ravivait les couleurs toujours attendrissantes de Mantronix, Grandmaster Flash ou Bambaataa. On retournait ainsi à cette belle école rebaptisée old-school, histoire de nous faire remarquer à quel point on devait s’y sentir comme d’anciens élèves, voire comme d’anciens combattants , celle de l’électronique hasardeuse, des courts-jus dans les beatboxes, des étincelles dans les synthés de récup. Pas étonnant, dans ces conditions, d’avoir repéré dans les parages de l’increvable My beatbox Roc Raider, scratcheur voltigeur chez les X-Ecutioner, ou de voir le label new-yorkais Rawkus remercié chaudement sur la pochette : au coeur même d’une electro niquée, d’une old-school retapée, revitalisée, DeeJay Punk-Roc ne pense qu’au hip-hop, même si l’esprit divague.
Devant ces rimes et arrangements puérils, à la nostalgie palpable (« So, y’all like the old skool' »), on ne peut s’empêcher de penser aux Californiens de Jurassic 5 qui se souvenaient récemment, eux aussi, de la cour en béton de leur école. Pas étonnant, non plus, que DeeJay Punk-Roc ait été révélé par l’Angleterre, qu’il ait été ramené de force sur ces terres dont il ne connaissait jusqu’alors que les bases militaires de l’Otan où il fut parachutiste pendant cinq ans par l’écurie Air Dog de Liverpool : les rythmes défendus par cette armoire à glace sont, depuis quelques années déjà à Londres, Brighton ou Nottingham, le fondement même de l’euphorie qui illumine quelques nuits fameuses, la pierre philosophale d’un big-beat pas aussi big-bêta que veulent bien l’écrire les puristes, ces défenseurs de la danse aryenne. Car si l’Angleterre ne possède problème de langue, bizarrement aucune alternative à opposer au rap courant d’Amérique, ses clubs ont, depuis longtemps, détourné le hip-hop à des fins strictement festives. Et si la France possède la plus importante poche mondiale de résistance locale à la dictature yankee (nos boys’ bands équipés par Carhartt et Uzi), l’Angleterre ne se gêne pas pour coucher avec l’ennemi, avant de lui faire les poches, de lui chouraver les plans, de le trahir avec une allégresse admirable. Ainsi, il s’est, en 97, vendu plus de platines disques que de guitares en Angleterre : des millions de DJ’s, mais presque aucun MC digne de ce nom pour prêter sa voix, tout le paradoxe du hip-hop britannique, qui est en train de faire de ce natif du Bronx une star. Il faut d’ailleurs voir les sets particulièrement ouverts de DeeJay Punk-Roc (on pense à ceux, tout aussi furieux et débridés, de FatBoy Slim) pour se convaincre que la old-school a ouvert ici l’une de ses plus tumultueuses et joyeuses succursales. Une école sans manuels, sans discipline, aux cours d’histoire rigolards, à l’éducation physique enragée mais souple. Une école où le métissage est un art de vivre, le sectarisme une cause de renvoi. Une école où l’hymne a été soufflé par Charles Trenet : « Y’a d’la joie, partouze, y’a d’la joie. »
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