On ignorera le carnet mondain médisant (Tony Joe White s’en est mis plein les fouilles en fourguant quelques chansons à une Tina Turner sur le retour et, nanti d’un beau brin de fille a, selon la rumeur maligne, failli se retrouver beau-père de Johnny Hallyday) pour savourer une immortelle histoire du bayou. Celle d’un fieffé […]
On ignorera le carnet mondain médisant (Tony Joe White s’en est mis plein les fouilles en fourguant quelques chansons à une Tina Turner sur le retour et, nanti d’un beau brin de fille a, selon la rumeur maligne, failli se retrouver beau-père de Johnny Hallyday) pour savourer une immortelle histoire du bayou. Celle d’un fieffé flemmard très occupé à s’entraîner pour le championnat du monde de tournage de pouces (He don’t overdo it, soit « Il se la coule douce »), un oeil perdu au fond du décolleté de Dolly Parton, l’autre lorgnant le bouchon de sa ligne à gardons. Entre bouilleurs de cru veillant sur leurs alambics et gargantuesques platées de jambalaya, Tony Joe White règne depuis plusieurs éternités sur une merveilleuse province, où les voitures font au moins trois Clios de long et les filles autant d’Elodie Bouchez de tour de poitrine. Une province énigmatique aussi, où le siècle s’arrête à l’orée des marais, quand les pirogues vermoulues prennent le relais des Cadillacs chromées. Une musique amphibienne s’y prélasse, entre coulées de sucre d’orgue et harmonica ruisselant de liqueurs clandestines. Dans ses disques, le blues vient en voisin, sans s’encombrer de l’attirail touristique qui, de Bourbon Street à Beale Street, de La Nouvelle Orléans à Memphis, écarquille les mirettes des badauds. Apprivoisé par trente ans d’intimité, le blues ronronne, économe et matois, débarrassé des bateleurs cracheurs de feu et des solistes quadrumanes (I believe I’ve lost my way); les romances espagnoles froufroutent, uniquement voilées de vaporeuses mantilles noires (Selena). Sur One hot July, il ne se passe donc presque rien mais un rien d’une somptueuse décontraction, aux frémissements infiniment chantants, aux chuchotis palpitants, aux euphémismes caniculaires (Crack the window baby). Décanté jusqu’à la plus lumineuse limpidité, le blues de Tony Joe n’avait jamais été si paresseux, ni amoureux à l’ombre des palétuviers pensifs, juillet a trouvé son Roméo.
{"type":"Pave-Haut2-Desktop"}
{"type":"Banniere-Basse"}