Avec les New-Yorkais Arsonists, le hip-hop a trouvé les ambassadeurs de son étincelant renouveau. Une bonne raison de se rendre aux Transmusicales de Rennes où, c’est juré, ils vont vous mettre le feeeeeuuuuuu (air connu). L’histoire d’amour avec les Arsonists débuta par le choc d’un maxi d’anthologie, The Session/ Halloween, sorti sans tambour ni trompette […]
Avec les New-Yorkais Arsonists, le hip-hop a trouvé les ambassadeurs de son étincelant renouveau. Une bonne raison de se rendre aux Transmusicales de Rennes où, c’est juré, ils vont vous mettre le feeeeeuuuuuu (air connu).
L’histoire d’amour avec les Arsonists débuta par le choc d’un maxi d’anthologie, The Session/ Halloween, sorti sans tambour ni trompette il y a plus de deux ans. On ne savait rien d’eux, si ce n’est leur origine, Brooklyn, mais le palpitant s’emballa d’emblée pour ce qui restera à jamais comme la première preuve éclatante que, derrière la façade déprimante alors offerte par le rap, une dynamique était à l’oeuvre : dans l’ombre, les forces vives du hip-hop n’avaient pas renoncé à lutter, et une vague de sang neuf ruait dans les brancards.Les brillants maxis suivants, Venom/Seed et Blaze/Flashback confirmèrent les soupçons. Arsonists, cinq B-boys à majorité portoricaine et ambassadeurs de la prestigieuse fraternité hip-hop du Rock Steady Crew, comme on allait finir par l’apprendre, préfiguraient bien la lame de fond actuelle. Militant, malin, ludique, théâtral, pratiquant avec la même passion l’art du MCing, du DJing, de la danse et du graff, le groupe incarne cette culture dans toutes ses dimensions. « Nous ne sommes ni underground, ni commerciaux, ni old-school, ni new-school, mais tout simplement hip-hop », aiment-ils à répéter. A Londres cet été, à quelques semaines de la sortie de leur premier album chez Matador plus connu pour ses fleurons indie-rock , c’est d’abord les bras chargés de stickers et d’affiches que nous les cueillons : Q-Unique, Swell Boogie, D-Stroy, Freestyle et Jise s’apprêtent à retapisser à la main les murs du quartier d’Euston Square pour annoncer leur concert le soir même à l’université, en compagnie des voisins d’écurie Jon Spencer, Non Phixion et Cornelius.
Vifs, enthousiastes, jamais en retard d’une blague, ils occupent l’espace du trottoir avec autant d’aisance qu’ils le feront plus tard sur scène, distribuant sourires et affiches aux passants avec un don irrésistible pour l’autopromotion. « Notre nom, Arsonists (« pyromanes »), fait écho aux métaphores incendiaires utilisées dans le hip-hop : un beau graff est un « brûlot », les DJ « fument » la concurrence et les breakdancers « brûlent » le sol. Nous, nous mettons le feu aux micros », explique Q-Unique avec une pointe de malice. Ce qui serait simple bravade de rappeur flambeur si l’album As the world burns ne joignait pas aussi brillamment l’acte à la parole. Alternant humour et gravité, folie et noirceur, doté de l’intensité dévastatrice de cinq tueurs du micro, ce disque brûle effectivement d’une énergie rare. Fanatiques de dessins animés, avalés goulûment lors de toutes leurs étapes à l’étranger, le club des cinq a bien retenu le ressort dynamique des Tex Avery : les rugissements et autres couineries réjouissantes rythment les turbulents Backdraft, Pyromaniax, Session et Geembo’s theme. Ajoutez à cela l’hilarant freestyle de Lunchroom takeout, saturé de jeux de mots à se tordre, et vous pensez tenir la playlist d’un groupe euphorique pour cour de récré. Mais ce serait oublier la facette sombre et venimeuse. « A cinq, on ne peut pas se laisser aller à la déprime, l’état d’esprit collectif nous tire constamment vers le haut, souligne D-Stroy. Nous n’avons pas peur d’exprimer la joie mais nous ne censurons pas non plus l’amertume et la rage. Prêts au bras de fer si on nous asticote, comme Jackie Chan et Bruce Lee : souriants au demeurant, mais emmerde-les et tu te fais botter le cul. »
Au cas où vous voudriez tâter de leurs coups de tison, commencez par dénigrer le hip-hop. Le tour de force Underground vandals, dans lequel tous les noms des groupes qu’ils respectent de Dr Octagon aux Beatnuts servent de matière première pour conter l’histoire d’un graffeur, est un hommage particulièrement remarquable. L’irrésistible Rhyme time travel, voyage dans le temps à travers toutes les étapes du genre, du phrasé lent de Rakim jusqu’au débit accéléré d’aujourd’hui illustré par Company Flow, en est un autre. Mais ce sont sans doute les souvenirs personnels liés aux premières années du hip-hop, égrenés sur Flashback, dont on se servira en priorité pour éduquer nos enfants d’ici dix ans. Car inutile de se fier à MTV, à l’industrie et aux magasins pour se faire une idée juste de l’état du hip-hop, il suffit de se frayer une place au premier rang des shows d’Arsonists : « Sur scène on ne veut surtout pas ressembler à des foutues bêtes en cage, allant et venant en se tenant les couilles. » Plutôt à une bande de marsupilamis endiablés, multipliant les cabrioles et les clins d’œil la locomotive ou la machine à remonter le temps de Rhyme time travel, un régal dans un feu d’artifice théâtral de couleurs et d’idées où le spectateur, pris régulièrement à partie, ne sait plus où donner du regard.
Une ivresse malicieuse qui ne va pas sans certains excès : « A force de se faire des tours pendables entre nous, il arrive qu’on se casse une dent sur scène, ou que l’un de nous tombe parce qu’on ne l’a pas retenu. Au Danemark, D-Stroy s’est retrouvé à poil à la fin du show, avec seulement sa ceinture autour de la taille. » Rien de tel pour mettre le feu en ouverture des imposants Roots, dont ils ont accompagné la tournée de printemps, ou de la force de frappe de Public Enemy, qu’ils auront l’honneur de précéder jeudi aux Transmusicales.
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