Après une longue tournée à travers toute la France, Nada Surf faisait halte le 10 à Paris pour présenter son excellent troisième album, Let Go. Un concert qui, malgré quelques surprises, se révéla décevant. Récit.
Si au fond nos c’urs, on gardait depuis longtemps une place au chaud pour le trio power-pop Nada Surf, il faut bien reconnaître que cette année 2002 les a vus revenir au premier plan. Avec un album parfaitement maîtrisé, Let Go, une tournée qui les a vus arpenter toute la France pendant plus deux mois et une couverture médiatique des plus honorables (télé, radio, magazine), l’année 2002 fut des plus bénéfique pour un groupe que beaucoup pensait pouvoir résumer à son seul tube, le grungy Popular.
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Pourtant, en 1998, Nada Surf avait sorti un album étonnant, The Proximity Effect, à mille lieues des dérives punk de son premier album High/Low. The Proximity Effect annonçait de bien belle façon ce revirement pop qui illumine aujourd’hui Let Go.
Sur ces 80 Windows, Amateur ou The Voices, le groupe donnait déjà une formidable leçon d’écriture pop, alternant pépites power-pop et ballades mid-tempo aux accents mélancoliques entêtants.
Malheureusement, cet album ne trouva pas son public : les fans du premier album iront se faire maltraiter les oreilles ailleurs et les autres ne daigneront pas accorder attention à ce groupe pour teenager boutonneux.
Pendant ces quatre longues années, on guettait un éventuel retour du tandem Matthew Caws / Daniel Lorca, respectivement chanteur-guitariste et bassiste, mais les années passant, on était plutôt préparé à recevoir un faire-part de décès.
Lorsque Let Go a finalement pointé le bout de son nez, les amateurs ont retrouvé ce songwriting intact, tout juste plombé par une tristesse insondable qui semble avoir pris les commandes d’une musique autrefois plus naïve.
C’est donc fort impatiemment que l’on attendait le passage de Nada Surf à Paris, après une longue tournée aux échos fort élogieux. On en ressortira malheureusement un brin déçus.
Dès le début en solitaire de Matthew sur Blizzard of 77, on comprendra que le son ne sera pas à la hauteur, la voix trop en avant, les guitares docilement reléguées en arrière plan. L’Elysée-Montmartre n’est pas réputé pour son acoustique, une réverbération naturelle transformant d’emblée tous les sons joués dans la salle.
Annoncé comme une date un peu spéciale dans le long périple français du groupe, ce concert fut l’occasion pour le groupe d’être accompagné pour la première fois de sa tournée par un clavier, dont la présence fut vite oubliée tant le faible volume qui lui était alloué frisait le ridicule.
L’autre surprise de la soirée fut la présence sur scène de l’équipe de Benjamin Biolay constituée d’un quatuor à cordes dont les partitions ont été écrites pour l’occasion par « le nouvel ami de la chanson française de qualité ».
L’idée n’était pas foncièrement mauvaise mais le résultat prêtait plus à l’agacement. On aurait volontiers conseillé à nos amis de Nada Surf de s’adresser à Vincent Segal (le violoncelliste déjanté de Bumcello), qui aurait plus judicieusement mis la musique du trio en danger plutôt que de la décorer d’apparats de nouveau riche.
Heureusement, la présence de la s’ur de Benjamin, Coralie Clément, sur le décidément enivrant Là pour ça, seule chanson en français du répertoire de ces musiciens pourtant francophones, nous rassurera sur les choix du groupe, la tendre voix de la jolie brune venant à point pour illuminer cette ballade douce-amère.
Un medley enchaînera audacieusement leur triste Stealmate, chute d’un premier album que l’on n’entendra que peu durant ce concert (le groupe lui préférant fort heureusement les deux derniers albums), avec le Love Will Tear Us Apart de Joy Division, dans une version ralentie et gonflée par la réverbération de la salle.
Les deux rappels verront le son s’améliorer, notamment sur un Blonde on Blonde tout en retenue et on se surprendra à hocher la tête sur le vieille scie Popular qui résiste curieusement bien au poids des années.
Ce concert décevant d’un groupe que l’on avait déjà vu dans de bien meilleures conditions ne saurait cependant nous faire oublier que Let Go est un des tout meilleurs album de cette année finissante et que désormais, l’avenir leur appartient. Vivement le prochain album !
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