Ca continue de chauffer dans les caves parisiennes : avec FRUSTRATION et FRICTION, c’est la banquise cold wave qui fond.
Vingt-cinq ans pour que la France comprenne. Vingt-cinq longues années pour se rendre compte que l’esprit de la new-wave ne s’inventait pas en singeant Ian Curtis ou en se peinturlurant comme Robert Smith. Et encore moins en essayant de trouver sur internet la formule magique d’un lyrisme qui finissait par se réduire à un écran de fumée. Enfin capables de ne plus se laisser submerger par le lourd héritage des sombres maîtres de la fin des années 1970, des groupes français s’adonnent aujourd’hui librement au genre sans passer pour d’infâmes suiveurs.
N’en déplaise à leur nom, les Parisiens de Frustration ont réussi sur leur premier album à extérioriser la violence sourde qui les anime, confiant à un Bosco la lourde tâche de la canaliser à travers sa production. Entre le Wire époque Pink Flag, tordu et diablement efficace, sur le morceau Relax où tout est dit en moins de deux minutes d’hypertension, les lignes de guitares à la New Order (Too Many Questions) ou les déflagrations destructurées à la The Fall (Brothers!), c’est toute l’Angleterre du post-punk de l’ombre (Crisis, Death In June) qui est concentrée sur leur album. L’Amérique rugueuse de Sonic Youth, Fugazi ou Savage Republic gronde aussi en de nombreux éclairs, comme la France révoltée et sèche des Provisoires, Métal Urbain ou Warum Joe. Des influences ancrées à la charnière des années 1970/1980 et animées par une violence toute contemporaine, un morceau capital (le sommet No Trouble), il n’en fallait pas plus pour réussir un impressionnant premier album à danser dans les catacombes.
Face aux quadras de Frustration, les trentenaires de Friction passeraient presque pour des kids. Eux aussi ont eu le temps de mûrir leur rock électrique forgé à coups de références sagement digérées : Television bien sûr, comme leur nom et la guitare acide de XvsY l’indiquent. L’ombre de Joy Division plane aussi, comme avec la guitare de You Think Too Much, un titre qui va ensuite s’essuyer les pieds chez les Strokes.
Le trio guitare, basse et batterie use aussi d’une boîte à rythmes et de vieux synthétiseurs. Du coup, l’urgence palpable chez Frustration se transforme chez Friction en énergie capable de vous transporter sur le dance-floor, à la manière du rock hybride de Rapture ou LCD Soundsystem. Là, Friction finit par affirmer sa vraie personnalité dans les rythmiques stroboscopiques (Dig It). Jeunes de France qui ne les aviez pas connues : les années 1980 ont encore plein de choses à raconter.
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