En direct des bouges de la République Dominicaine, la première compil de bachata vintage.
(IASO Records/Nocturne)
Gloire et prospérité à tous ces lieux de perditions, à tous ces cabarets, maquis, shebeen, juke joints, d’où filtrèrent tant de musiques sans pedigrees qui ont conduit des millions d’hommes et de femmes aux mêmes transports, qu’il s’agisse de communion bachique ou de drague salace, unanimement réprouvés via bulles et fatwas par églises et mosquées. Sans eux, point de raï, de zouglou, de mbaqanga ou de blues et vous imaginez combien la vie serait plus triste encore. Le dernier spot à entrer en ligue 1 des bouges où ça remue nous vient de République Dominicaine, pays où la bachata, à la manière des premiers sound-systems jamaïquains, a finit par manufacturer un produit maison dont cette compilation propose une dégustation des meilleurs malt. De 1960 à aujourd’hui la bachata a gagné sinon ses lettres de noblesse du moins une certaine reconnaissance après une très longue période de mise à l’index et d’obstruction par le merengue, quasiment devenu musique nationale sous la dictature de Rafael Leonidas Trujillo, caudillo à la queue intenable (sur ce sujet, on recommande l’extraordinaire roman de Mario Vargas Llosa, La Fête au Bouc). Bachata Roja nous guide en 14 tubes incontournables à travers 30 ans d’un âge d’or où le genre est passé de l’underground à la légitimation sans rien perdre de son frétillant ni de son pétillant. Naturellement, on y croise beaucoup de borachos à voix liquoreuse, comme Julio Morales ( Yo Pagaré la Cerveza) ou Marino Perez (O La Pago Yo O La Paga Ella) et bien souvent l’ombre de femmes de mauvaises vies qui obscurcit l’âme d’inconsolables hidalgos, tel ce pauvre Eladio Romero Santos parti à la recherche de la volage Muneca. Tout ça est chanté avec style et élégance sur des tonalités embrasées proches des cubains Miguel Matamoros et Guillermo Portabales. Les rythmes boléro, jibaro ou merengue y sont privilégiés, quoique d’autres plus rares, tel la mangulina, fassent de plaisantes intrusions. Attention : cette sélection n’a rien à voir avec la bachata moderne, plus percussive et électrique mais moins malicieuse. Faite un détour par le salon de coiffure pour dames de Julio Angel (El Salon) et vous comprendrez tout ce que les musiques caribéennes ont pu perdre en passant du mode suggestif à l’explicite. Au fait, que peut donc vouloir shampouiner avec un tel entrain ce bon Julio ?
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