Les 30 paris des Inrocks : livres

Cécile Coulon, 25 ans, écrivaine postgenre
Née en 1990 à Clermont-Ferrand, cette jeune romancière a déjà publié sept romans. Remarquée dès 2010 avec son deuxième, Méfiez-vous des enfants sages, Cécile Coulon aime revisiter les genres (comme le polar) et injecter à la littérature ce qui souvent reste à l’extérieur. Elle a écrit une thèse sur les rapports entre le sport et la littérature, et a consacré Le Cœur du pélican (2015) à la course à pied. NK

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Manuel Cervera-Marzal, 28 ans, philosophe engagé
Pour un suicide des intellectuels (Textuel), récent essai provocant et stimulant, est déjà le sixième ouvrage politique de Manuel Cervera-Marzal, qui n’attend pas le nombre des années pour affirmer une parole forte et déterminée dans l’espace intellectuel de la gauche critique.

Soucieux de démocratiser radicalement le monde des idées, en appelant à fissurer la catégorie sociale des intellectuels au nom du postulat (cher à Jacques Rancière) de l’égalité des intelligences, ce jeune docteur en science politique, auteur d’une thèse sur la désobéissance civile, regrette le manque d’engagement politique de la majorité des universitaires en France.

Proche de la mouvance libertaire, ancien militant au NPA, il œuvre avec l’énergie de l’espoir à l’élaboration d’un récit politique alternatif, attaché à la notion d’intellectuel collectif qu’il puise dans le militantisme. Ecrire, chercher, militer, révolutionner : tout relève chez lui d’un même geste, plein d’élan. JMD

Michael DeForge, 29 ans, dessinateur absurde
Né à Ottawa, Michael DeForge a découvert la bande dessinée et appris à dessiner grâce à la collection de BD de son père, fan de superhéros. Parallèlement à son travail de designer pour la délirante série animée Adventure Time, ce Canadien a publié de très nombreux récits courts et a coédité des fanzines et plusieurs anthologies de BD.

Son premier long récit, La Fourmilière, a été publié aux Etats-Unis en 2014 et témoigne parfaitement de son humour unique, de son solide sens de la narration et de son goût radical pour l’étrange et l’absurde – qu’il sublime par son dessin, minutieux, surréaliste, entre le macabre et l’élégiaque.

Son travail a déjà été récompensé outre-Atlantique par plusieurs Ignatz Awards, les récompenses de la BD indépendante. Les éditions suisses Atrabile publient son œuvre en français et son nouveau recueil d’histoires courtes, Dressing, sort courant février. ACN

Anastasia Colosimo, 26 ans, chercheuse réaliste
Cette doctorante en science politique à Sciences-Po, où elle enseigne l’histoire du blasphème et de la liberté d’expression, sujet de sa thèse en cours, vient de faire son entrée dans l’arène publique via un essai éclairant : Les Bûchers de la liberté (Stock). Nourri de ses connaissances en théologie politique, son livre a été écrit après les attentats de janvier 2015 qui l’ont “mortifiée”.

Soucieuse de réintroduire dans le débat public des perspectives qu’elle étudie depuis quatre ans sur la liberté d’expression, elle sait que sa génération sera déterminée par l’événement “Charlie”. “Le 7 janvier, c’est l’entrée dans l’histoire pour ma génération”, confie-t-elle. Passionnée du fait religieux depuis son adolescence, elle voudrait ne pas se cantonner au champ intellectuel et contribuer à changer le réel. “Quand on n’est pas Hannah Arendt, mieux vaut se rendre utile.”

D’où son envie de passer le concours d’entrée à l’ENA pour servir l’Etat, en plus de la rédaction de sa thèse. “Le travail me calme, me désangoisse”, dit-elle avec un sourire franc, traversé par le sentiment d’inquiétude d’être au monde. JMD

Simon Roussin, 29 ans, dessinateur lumineux
Né en 1987, diplômé des Arts déco de Strasbourg, Simon Roussin a publié depuis 2010 une poignée d’albums qui réinventent la BD de genre et déclinent avec brio ses thèmes de prédilection : le héros, l’aventure. Il réalise de nombreuses illustrations pour la presse (So Film, XXI, Sunday Times Magazine…) et a fondé la revue Nyctalope avec Marion Fayolle et Matthias Malingrëy.

Travaillée avec des à-plats de couleur au feutre ou en noir et blanc à la palette, l’esthétique de Simon Roussin est faite de lumière et de contrastes, et elle est toujours mise au service d’une narration rythmée, aux dialogues percutants et poétiques.

Les éditions L’Employé du Moi viennent de rééditer son premier récit, Robin Hood, et son prochain album, Prisonnier des glaces – qui inaugure un cycle de livres sur l’aéropostale intitulé Les Ailes brisées –, paraîtra en mars aux éditions 2024. ACN