Le neurochirurgien Sergio Canavero propose de greffer la tête d’un homme sur le corps d’un autre. Il affirme avoir déjà réussi cette prouesse technique sur un singe.
Mais comment distinguer le greffé du greffon ? En Chine, où les considérations éthiques sont plus souples qu’ailleurs, le docteur italien Sergio Canavero a mis au point, avec l’aide d’un professeur chinois, une technique pour souder la tête d’un animal sur le corps d’un autre. Il a réalisé plusieurs fois déjà cette délicate opération sur des souris, mais voilà qu’il s’attaque maintenant à plus gros et à plus proche de l’homme : le singe.
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Et il ne s’agit pas simplement de coller la tête sur le corps, de suturer le pourtour du cou et d’attendre que la soudure se fasse. Il faut patiemment réaliser “la fusion des moelles épinières du donneur et du receveur. C’est la clé de voûte de l’intervention”, a confié le médecin à Sciences et avenir.
Rabibocher les fibres nerveuses
Cette fusion nécessite l’adjonction de molécules PEG (poly-ethylene-glycol), capables de rabibocher les fibres nerveuses des deux moelles épinières, celle du donneur (le corps) et celle du receveur (la tête). Canavero jure que les souris ont retrouvé leurs capacités motrices après l’intervention.
Prochaine étape, en 2017 : tester la technique sur un humain, en l’occurrence Valery Spiridonov, un Russe d’une trentaine d’années victime d’une maladie qui ratatine son corps. Ne revenons pas sur le débat éthique. On greffe déjà avec succès, et pour le meilleur, différents organes. On le fait aussi avec différents membres. Alors, pourquoi l’idée de tout greffer d’un coup poserait un problème ?
Une nouvelle anatomie
Ce qui dérange, c’est d’imaginer s’emparer du corps entier d’un autre, sans doute. Et pourtant, en matière d’imagination, la fiction l’a envisagé depuis longtemps. Alex Murphy, dont il ne reste plus grand-chose après une tentative d’assassinat, garde sa tête mais prend le corps d’une machine, dans Robocop.
L’écrivain Hubert Haddad raconte dans son dernier roman, Corps désirable (Zulma), l’histoire du docteur Cadavero (tiens…) qui colle la tête de Cédric Allyn-Weberson sur un corps étranger et décrit les sensations d’un homme doté d’une nouvelle anatomie. Le genre de roman qui, il y a seulement quelques années, aurait gravement souffert d’un manque de vraisemblance, à classer dans la catégorie fantastique et fantaisiste. Ainsi, il n’y avait que H.G. Wells pour penser qu’un jour l’histoire de son IIe du docteur Moreau (1896) dans laquelle un savant fou transformait des bêtes (porcs, pumas, singes) en hommes par des opérations chirurgicales n’aurait bientôt rien d’extraordinaire.
D’authentiques sirènes
Songeons d’ailleurs aux avantages de telles manipulations. Les couples fusionnels pourront l’être vraiment à fond. Et pourquoi interdire à un humain de souder sa tête au corps d’un lion ? Voilà pourtant un magnifique sphinx.
Il ne sera pas incongru de voir des dauphins bipèdes nager de conserve avec d’authentiques sirènes. Les chevaux se verront pousser des ailes, ou une corne sur le front. Notre monde n’aura alors plus rien à envier aux vieux mythes. Il nous faudra en inventer d’autres.
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