Retour en catimini et miné du songwriter, héros de l’americana
On avait laissé Neal Casal en 2006 avec No Wish to Reminisce, disque si luxuriant que l’écouter sans une machette à portée de main relevait de l’épreuve herculéenne. On le retrouve avec un album dépouillé et embaumé de ces senteurs qu’on hume chez les luthiers et dans les forêts du Wyoming. On ne sait si l’idée d’un tel contrepied lui est venue entre deux prises lors de l’enregistrement du dernier effort de Ryan Adams (dont il est le guitariste au sein des Cardinals) ou si elle est le fruit d’une rencontre inopinée de son crâne avec une poutre, toujours est-il que cela faisait un bail que l’on n’avait pas entendu de chansons aussi modestes de la part du songwriter de Denville. Placé sous le signe de la guitare acoustique, Roots & Wings n’en demeure pas moins un album sophistiqué, dont chaque arrangement semble avoir été précautionneusement pesé et mesuré, des chœurs feutrés de Chasing Her Ghost au banjo cavaleur de A Year and a Day en passant par l’harmonica ensablé de Superhighway. Comme à chaque retrouvaille, on ne peut toutefois s’empêcher de se sentir un temps interdit face à ces chansons bien ordonnées (les persifleurs parleront de préciosité), comme un visiteur gêné à l’idée de renverser une chaise d’un coup de sac à dos… avant de succomber à l’élégance vocale et scripturale d’une folk-song solaire (Traveling Lighter), d’un blues osseux (Keep the Peace) ou d’une mélodie pop joliment flexueuse (Here by the Sea), bref d’un album pour lequel le terme americana aurait pu être inventé.