J. W. Anderson a créé la surprise en diffusant son dernier défilé via l’appli de rencontre destinée aux gays.
Oui, ceci est bien une interface Grindr, cette appli pour les gays permettant de géolocaliser un monsieur et de lui proposer une partie de roulé-boulé impromptue. Non, le jeune homme à l’écran n’est pas à la recherche d’une rencontre polissonne (du moins pas là) : il est trop occupé à défiler en live pour le show masculin de J. W. Anderson.
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Une mise en scène de soi immédiate
Ce styliste londonien connu pour sa mode homme queer et provoc a en effet choisi, cette saison, de streamer sa présentation en exclusivité via Grindr. Pour lui, la plate-forme fait partie de la culture numérique actuelle : “Je ne vois franchement aucune différence entre Grindr, Instagram ou Facebook”, a-t-il déclaré. Le point commun entre tous ces réseaux sociaux ? Une mise en scène de soi en quête de séduction immédiate. “La mode, c’est la même idée (que Grindr – ndlr), les vêtements en plus”, a-t-il ajouté.
Dans une culture hautement visuelle, délivrée par de minuscules icônes sur un téléphone, un langage du désir se met en place : des abdos huilés comme un manteau griffé ne délivrent-ils pas le même message de besoin de rcnnaissance ? L’honnêteté d’Anderson et de Grindr est de replacer l’érotisme – souvent latent – au centre de la médiation de soi-même. Et cela porte ses fruits : si, sur sa propre chaîne, le défilé du créateur atteint 5 000 vues en six mois, Grindr estime à 1 million ses utilisateurs à la minute au cours d’une journée.
L’appât du pink dollar
Pas étonnant donc que la plate-forme ait le vent en poupe, dans des sphères inattendues. Après avoir obtenu Uber et Airbnb comme annonceurs puis organisé des ventes de tickets de concerts pour Nicki Minaj et Madonna, Grindr choisit fin 2015 un bureau de presse de mode, PR Consulting, pour le représenter.
Ce flirt entre le luxe et le réseau social permettra de capitaliser sur ce que les Américains appellent le “pink dollar”, ou l’argent d’une clientèle gay (comme quand Givenchy, marque au sous-discours homo-érotique, ouvre ses portes en plein “gay Marais” à Paris).
Il permettra aussi de ne plus ghettoïser une sexualité gay encore taboue et de la réintroduire au cœur de la culture actuelle. Pour J. W. Anderson, c’est une continuation fluide de son propos stylistique – et pour les millions d’utilisateurs, une liberté qui surpasse enfin l’appli.
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