Méchant et patraque, du psychédélisme qui vit dans les bois
Drôle de titre quand les perles sont justement les chansons. On n’attendait pourtant pas les Américains au cœur d’une telle tempête, d’une telle foison, après un Rites Of Uncovering qui donnait de la campagne américaine une vision un peu cauchemardesque : une terre brûlée, un désert, où ne poussaient que le chardon, des champignons hallucinogènes et des serpents. On connaissait ce paysage pour y avoir souvent campé : Dave Heumann, la voix tendre et la guitare acide du groupe, a plusieurs fois partagé des feux de camp avec Bonnie Prince Billy. On reconnait à peine cette campagne sur ce troisième album : le psychédélisme, autrefois aride, se fait aujourd’hui touffu, luxuriant ; l’électricité chancelante, en bout de ligne, se déverse désormais en boules, en décharges, en spasmes comme ceux qui agitent Neil Young les soirs de pleine lune. Mais les chansons, elle, restent droites dans la tempête. Urgentes, tremblantes, enregistrées pour la première fois en vrai groupe, elles délirent dans une fièvre noire, mélangent le folk médiéval et le rock marécageux de Creedence. Même quand Dylan, qui ne leur a pourtant rien fait, tombe entre les mains de ces hommes des bois, il passe lui-même dans leur grande déchiqueteuse, méconnaissable sur un Tomorrow Is A Long Time terrorisé. Avant ça, c’était son mentor Fred Neil (en tout cas sa voix, miracle de pureté inquiète) qui avait été convoqué par la gorge profonde de Dave Heuman, sur la merveilleuse chanson Song Of The Pearl. Un rare moment de paix et d’accalmie dans un disque rongé par le mauvais sang, lui même pourri de drogues artisanales, qui font passer le moonshine pour de l’eau de source.
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