Après le récent album de Nathalie Nathiembé, voici ceux, non moins superbes, de Salem Tradition et Tifred. Bien assez pour évoquer la montée en puissance d’une nouvelle génération sur la scène réunionnaise du maloya. Bien que rudimentaire en raison de sa disposition instrumentale ? essentiellement des chants et des tambours ?, le maloya est l’expression […]
Après le récent album de Nathalie Nathiembé, voici ceux, non moins superbes, de Salem Tradition et Tifred. Bien assez pour évoquer la montée en puissance d’une nouvelle génération sur la scène réunionnaise du maloya. Bien que rudimentaire en raison de sa disposition instrumentale ? essentiellement des chants et des tambours ?, le maloya est l’expression majeure d’un monde tourmenté ne cessant d’accoucher de lui-même. Il est le maître-outil sollicité dans la construction de cette fameuse identité créole qui épouse d’autant mieux les séismes et les convulsions de notre époque qu’elle ne peut être achevée. C’est là sa force, son éternelle promesse. S’il ne se foutait royalement d’être reconnu, s’il aimait plus la frime, les honneurs ou l’argent, le maloya pourrait devenir un reggae de l’océan Indien dont Danyel Waro serait le Bob Marley. Waro qui a produit le premier album de son ancien choriste Fred Belhomme, dit Tifred.
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Avec sa voix d’oiseau blessé, Tifred va de branche en branche, en mal de tendresse, en soif d’amour, s’ébrouant les plumes de colère (Konyé). Sa gaieté attriste et sa douleur pétille (Monmom). La faute à cette langue mal pétrie, et si savoureusement expressive, que la voix de Christine Salem fait, quant à elle, rayonner sur Fanm ( Femme ) d’une dignité assez bouleversante. Christine emmène les tambours et les voix de chorale qui l’accompagnent avec l’autorité d’une meneuse de soulèvement. Mais ce qu’elle embrase le mieux, ce sont encore les feux de joie (Ilae ilao, Pilé). Avec ces artistes émergents, la résonance du maloya devient soudain si ample, son urgence si physique, que ne pas y rattacher la catastrophe sanitaire qui sévit là-bas (chikungunya), ou le consternant débat à propos du rôle positif de la colonisation qui fait rage ici, est proprement impossible.
Egalement disponibleTifred de Sitantelman
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