Sorti de (Smog), Bill Callahan se lance aux trousses de Lou Reed : un songwriter surdoué entre en lévitation.
Depuis déjà un album, Bill Callahan est sorti du (Smog), un peu comme s’il avait choisi de retirer le dernier filtre pudique qui séparait encore son adolescence artistique de l’accomplissement adulte – à 43 ans, remarquez, il était temps ! –, assumant au passage de ne plus être cette petite chose entre parenthèse, l’enfant du placard de l’alternative country amerloque pouvant tourner “amère loque” à la longue.
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Ses compositions ont ainsi gagné en clarté, même si la lumière qui les traverse provient toujours de l’intérieur, selon le procédé des lanternes magiques largement utilisé en son temps par Leonard Cohen. Ou par Lou Reed, dont Callahan se rapproche de plus en plus avec l’age, le Lou légèrement déphasé de Coney Island Baby (le poignant Jim Cain) qui croiserait en terrain déminé le John Cale expressionniste de Paris 1919 (le cabaret pop de Eid ma clack shaw).
Usant d’un storytelling sans faux ornements et de cordes assez tendues pour ne jamais donner l’illusion d’embourgeoiser artificiellement l’atmosphère, Callahan opte par moments pour un décalage rythmique qui donne à certaines chansons (My Friend) la sensation d’avoir un pied dans le vide. Il aspire à devenir un aigle, pas les Eagles.
Portée par un vent chaud, parfois de provenance orientale (l’extraordinaire The Wind and the Dove), parfois descendu des montagnes sacrées de Townes Van Sant (Rococo Zephir), son écriture atteint ici une sagesse et une capacité de séduction sans précédent. Too Many Birds, malgré là encore un rythme qui bat volontairement de l’aile, semblent avoir ainsi été ramené de la volière du paradis. Son premier album “solo”, Woke on a Whaleheart, taillait des flèches dans tous les bois, celui-ci retourne à la matière essentielle, prolongeant la féerie un peu fantomatique de (Smog) sous une météo plus clémente. Presque au beau fixe. Les cimes étant bien dégagées pour cet envol souvent majestueux.
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