Le leader de Swell continue de hanter le rock américain : cassé et classe.
C’était à l’orée des années 90, et le rock indé d’Amérique entrait dans l’horreur d’une profonde nuit. Frappées d’un spleen très baudelairien, des flopées de songwriters déclinaient leur musique sur le mode mineur, crevant l’abcès d’une jeunesse trop lourde à porter.
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American Music Club, Palace Brothers, Red House Painters, Swell… Emmenés par David Freel, ces derniers repeignaient San Francisco et les bicoques d’Haight Ashbury en noir, avec leur pop hypnotique, portée par la scansion outrée d’une batterie récursive, les soudaines fulgurances d’une guitare branchée sur le courant alternatif – tantôt acoustique tantôt électrique –, la voix déprimée d’un chanteur borderline.
Quelques siècles plus tard, au sortir d’un long trauma alcoolique ponctué d’épisodes opiacés, David Freel est encore là. Seul ou presque, amoché, cabossé, les plaies à vif, mais à peu près droit dans ses bottes, quoique mal planqué sous le pseudo transparent de Be My Weapon.
Sur March/2009, la plume toujours aussi amère, trempée dans le fiel des illusions perdues (Love Is Just So Overrated), il renoue même avec l’amplitude des premiers albums de Swell, d’hymnes maussades en valses bancales, comme on invoquerait des jours meilleurs, à défaut d’être heureux. Un peu comme ces grands dépressifs qui se forcent à aller bien, David Freel semble sur la voie de la guérison. Mais c’est encore dans ses fêlures qu’il puise le meilleur de lui-même.
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