Fort du beau petit succès de leur premier album éponyme et de leur participation au prochain festival Les Femmes s’en mêlent, rencontre avec les français de Diving With Andy qui nous racontent leur parcours et découverte, par l’écoute, de leurs univers pop.
Diving with Andy est un tout jeune groupe français ? même si Juliette, la jolie chanteuse, s’amuse à vadrouiller entre Bruxelles, Londres et Paris pour retrouver de temps en temps ses compagnons de chansons, Rémy et Julien. Comme aujourd’hui, où le trio enregistre une émission pour France 4, « leur première télé ». Rencontre avec ce groupe attachant, tout autant que leur premier album éponyme : un album de pop parfaite, orchestrée mais pas trop, sophistiquée mais touchante.
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Pour agrémenter la lecture de cette interview, découvrez par l’écoute Diving With Andy, avec une version acoustique inédite de leur morceau October in may, et deux titres issus de l’album, Manderley et Andrew.
Pour ceux qui ne vous connaissent pas encore, pourriez-vous vous présenter ?
Rémy : j’ai rencontré Juliette il y a une dizaine d’années autour d’un recueil des Beatles et d’une guitare folk. On chantait comme ça pour le plaisir de découvrir ce répertoire. Je l’ai ensuite perdu de vue. Entre temps, je suis entré au Conservatoire où j’y ai rencontré Julien. On a fait des études pour être ingénieurs du son, directeurs artistiques.
J’avais bien envie de revoir Juliette, j ai donc écrit deux chansons. Pour être sûr qu’elle vienne, j’ai demandé à un copain de faire les textes, pour qu’elle n’ait plus qu’à chanter. Et puis, on est allé une nuit en studio avec Julien enregistrer 2 titres. Comme on est ingé-son, il y en a un qui jouait les instruments : Julien était à la batterie, guitares et basses. Après, on : il allait à la console, et moi, aux claviers et aux cordes. Au bout d’une nuit, on avait déjà 2 titres ? dont Manderley. J’ai envoyé ça à Juliette
Avez-vous eu une éducation musicale particulière ?
Julien : mon père écoutait beaucoup de chanson, de la musique folklorique aussi, et du folk. Beaucoup de Leonard Cohen. Je jouais de l’orgue d’église, ce n’est pas très sexy comme instrument Mais vers 14-15 ans, il m a appris à jouer de la guitare, du rock, du Hendrix.
Rémy : j’ai commencé par le piano. Mon père était tromboniste dans une fanfare, il m a appris cet instrument. J’ai persévéré et je suis entré au Conservatoire. J’ai plutôt eu une formation classique.
Juliette : chez moi, on écoutait de la chanson francophone, William Sheller… J’ai été bercé à grand coup de Renaud aussi pendant les vacances et un peu de classique. Du côté de la famille de ma mère, tout le monde joue d’un instrument, beaucoup de cuivres. J’ai fait quelques années de piano, puis un petit détour par le saxophone pendant un an. Je crois que la musique a commencé pour moi quand ma mère est rentrée un jour du supermarché avec un album de Janis Joplin, avec le « Nice Price » dessus. Elle l’a mis dans le salon, j’ai trouvé ça détestable. Je l’ai mis dans ma chambre, j’ai persévéré et c’est vraiment à ce moment-là que je me suis mis à écouter de la musique.
Vous aussi, vous avez eu un jour un coup de c’ur ?
Rémy : pour moi, c’est un peu pareil. A cette époque, c’était encore des cassettes : une double cassette de John Lennon, avec une face Beatles et une Lennon solo. Je n’osais pas l’écouter, ça me faisait peur, j’avais 7-8 ans. Je cachais la cassette pour ne pas tomber dessus. Ca me mettait mal à l’aise C’est un de mes premiers souvenirs marquants.
Julien : pour moi, rien d’aussi traumatisant. Je me rappelle, je devais être en 6 ou 5ème et ça doit être Electric Ladyland de Jimi Hendrix. C’est le premier truc dont je me rappelle, un truc vraiment massif.
Pourquoi et comment en êtes-vous venus à la musique ? Qu’est-ce qui vous a donné envie de former un groupe ?
Rémy : pour Diving au début, il n’y avait même pas d’idée d’album ou de groupe. On faisait des chansons pour le plaisir d’être en studio, d’essayer des choses. On connaissait aussi beaucoup de musiciens-cordes, donc c’était l’occasion de les solliciter pour faire des arrangements-cordes. Au départ, c’était pour expérimenter des choses. Juste après ces deux premières chansons dont on parlait tout à l’heure, les gens nous ont vraiment encouragés. Il y a quelque chose d’assez naturel qui se dégage tant au niveau de la fabrication des chansons que du résultat.
Julien : la plupart des instruments que Rémy et moi jouons sur le disque ne sont pas les vrais instruments qu’on maîtrise. Je ne suis pas batteur et je joue quand même de la batterie. Ca donne ce côté frais et simple. C’est assez orchestré et sophistiqué mais c’est aussi assez simple et naïf.
Rémy : les encouragements des gens de la profession nous ont mis en confiance, Juliette, d’une part et nous. Les mois se sont enchaînés pendant lesquels on a essayé d’avancer sur 2, 3 chansons.
Juliette : j’ai commencé à écrire des textes. Et je me suis mise à apprivoiser ma voix. Même maintenant, avec les concerts, elle est différente, elle évolue. Sur l’album, tu te rends compte que l’accent anglais n’est pas toujours le même ! Petit à petit, chanter des textes qui m appartenaient, c’était aussi une manière de rentrer dans le projet, trouver ma place.
Rémy : il y a un morceau qui nous a aidé à fixer l’album et l’atmosphère, ça a été Andrew. On a réussi à équilibrer un peu les choses avec des morceaux très mélancoliques, nostalgiques comme Balancing my head, Dear ou Manderley. Est arrivé Andrew, chanson pour laquelle j’ai essayé de trouver un autre style, pour contrebalancer. Dès qu’on a fait cette chanson, l’idée de l’album était un peu plus claire. Ca a aussi permis à Juliette de montrer un autre caractère de texte, un tout petit peu plus ironique
Juliette : qu’on retrouve aussi sur Wishing I could taste him.
Que vous a apporté CQFD (le titre Manderley figurant sur la compil’ 2006) ?
Juliette : grâce à CQFD, beaucoup de programmateurs de salles nous ont ensuite contacté. Pas mal de webzines aussi.
Julien : des photographes, réalisateurs nous ont appelés pour nous proposer leurs services gratuitement ou moyennant finances, des choses plus ou moins intéressantes. Une violoniste nous a proposé de venir jouer avec un quatuor à cordes. Il se trouve qu’on connaît déjà plein de violonistes mais c’était super cool. CQFD nous a permis de faire ce genre de rencontres.
Vous aviez des chouchous sur la compil’ ?
Juliette et Julien : Winter Camp !
Rémy : j’aime bien Choc. Hey Hey My My aussi.
Julien: on aime beaucoup, en plus ce sont des gens avec qui on bosse. On bosse à côté d’eux plus précisément.
Rémy : on bosse dans le même studio. Ils nous ont invité un jour à jouer avec eux au Pop In, rue Amelot. Notre premier concert, c’était juste nous deux (Julien n’était pas là), guitare-voix en première partie d’Hey Hey My My. C’est un petit clin d’œil.
Comment en êtes-vous venus à travailler avec Xavier Boyer (leader du groupe Tahiti 80 qui apparaît sur Wasted Time) ?
Julien : c’est une histoire de famille en fait !
Rémy : ma copine le connaissait. Nous nous sommes croisés lors d’une soirée. Et c’est marrant parce que Xavier ne voulait pas qu’on discute de musique. Il essaie de bien séparer les choses. Au bout d’un moment, on s’est quand même trouvé des atomes crochus, donc je lui ai passé le disque. Il a été séduit. Je connaissais bien entendu Tahiti d’avant. J’avais envie d’un duo sur l’album. Entre-temps, j’ai fait des arrangements-cordes sur Fosbury, leur dernier album sorti il y a un an. Je trouvais aussi que par rapport à la composition, avoir un mec qui chante au-dessus d’une fille, c’est un principe un peu bizarre. Il a une voix extraordinaire, il chante très haut.
Juliette, tu écris les textes. Qu’est-ce qui t inspire ?
Juliette : ce sont surtout des chansons qui parlent d’amour, même si c’est un peu caché parfois. Dans une chanson comme Andrew, c’est une fille qui n’arrive pas à dire à un garçon qu’elle l’aime bien. Autour de ça, je suis pas mal sortie : les soirées tardives où tu abuses de boissons et de cigarettes, il y a beaucoup de choses comme ça Je trouve ça assez marrant les histoires de séduction. Et puis, il y a un côté plus poétique sur des chansons comme Dear ou The Waltz où je m adresse plus à quelqu’un en particulier. Du coup, c’est beaucoup plus intime. Mais j’aime bien noter des mots qui ont la même sonorité ou des jolies phrases que je rencontre. Et après, je travaille de la même manière dans mes textes, je décline un adjectif, un adverbe, j’essaie d’apporter une gradation. Si tu écoutes mes paroles, tu te rends compte qu’elle ne change pas énormément d’une phrase à l’autre.
Rémy : vu de l’extérieur, c’est assez littéraire par rapport à d’autres chansons et d’autres textes écrits par des anglais. Il y a le souci de l’histoire qui est important.
Juliette : oui, il y a le souci de la narration. J’adore lire des nouvelles. Même dans la musique : en une chanson, tu as le temps de raconter une histoire, il faut qu’il y ait un début, une situation initiale, un élément perturbateur et une situation finale. Ca a toujours été le souci. Pour ça, j’ai été très influencée par des gens comme Björk par exemple qui raconte toujours une histoire (c’est aussi avec elle que j’ai appris l’anglais) et par Suzanne Vega aussi Les anglais s’en foutent, c’est leur langue maternelle. Mais quand tu es français, il faut essayer de sortir du lieu commun.
Et je chante en anglais parce que depuis très longtemps, l’anglais est une partie super importante de ma personnalité. Juliette qui s’exprime en anglais et qui vit là-bas est une Juliette un peu différente de celle qui s’exprime en français et les deux se complètent assez bien : je dis d’autres choses avec d’autres mots.
Julien : de notre part, la musique est très anglaise, très pop. En fait, on a demandé à Juliette de nous écrire un truc et c’était évident pour tout le monde que ça allait être en anglais. Maintenant, on nous pose tout le temps la question, mais nous, on ne se l’était pas posée.
Juliette : en même temps, fais-moi chanter en français ! C’est différent parce que physiquement, tu produis le son différemment. En anglais, il y a des mots qui sonnent très bien, il y des belles voyelles et il y a une douceur assez incroyable, je trouve.
Quelles ont été vos influences ?
Rémy : au départ avec Julien, on avait écouté un disque de Stina Nordenstam qui s’appelle Memories of A Color, pour le côté minimaliste et aussi un disque de The Notwist. On s’est rendu compte qu’avec très peu d’élément, ces gens-là arrivent à créer une atmosphère et à t évoquer quelque chose sans même des paroles. Ca nous a bien inspiré au départ pour soigner les parties instrumentales de façon à en mettre très peu.
Julien : même si notre musique paraît sophistiquée, il y a en fait très peu de pistes, pour parler comme les ingénieurs du son. Et puis, il n’y a pas tant d’instruments que ça. Il n’y a pas plein de trucs qu’on empile les uns sur les autres. Chacun a sa fonction, on fait en sorte que chaque son ait sa petite histoire à lui. A chaque fois, ça colore le son, ça lui donne une sorte d’ambiance. Cela donne quelque chose d’assez coloré, assez typé.
Rémy : Melody Nelson de Gainsbourg aussi nous a influencé : au niveau du son de cordes, ça m a inspiré. Un peu plus largement, comme on a une formation classique avec Julien, j’ai mis le nez dans Ravel, Debussy, pour essayer de trouver des formules de quatuor qui marchent pour ce genre de musique.
Julien : il y a aussi des trucs plus opportunistes. Je pense à Balancing My Head où il y a des sons de flûte. En fait, Rémy venait juste d’écouter une chanson de Nina Simone où il y avait ce même son de flûte. On n’a pas écouté le disque en entier, juste ce morceau-là et on est partis là-dedans. Parfois, c’est plus ponctuel.
Rémy : oui, parfois on écoute un titre ou un disque, on trouve la production intéressante. Avant même de composer la chanson, on se dit qu’on va essayer de faire ça : justement marier une flûte à la Nina Simone avec une basse à la Gainsbourg, puis une atmosphère The Notwist. Balancing My Head, c’est ça en fait. Après ça, il y a les Beatles et tous les groupes pop des années 60 qui font vraiment partie de mes goûts musicaux. On se rend compte de ça dans notre musique.
Juliette : pour moi, il y a Suzanne Vega. Je suis également une inconditionnelle de Chan Marshall, Cat Power. J’ai eu une grande passade trip-hop avec Elysian Fields, Portishead, tous les guests de Massive Attack Il y a Keren Ann, j’adore Shannon Wright, Beth Orton aussi
Et en ce moment, qu’est-ce que vous écoutez ?
Julien : le dernier truc qu’on ait écouté avec Rémy, c’est Sufjan Stevens à fond.
Rémy : pour moi, c’est Ginger Ale : c’est le dernier truc que j’ai acheté et j’ai trouvé ça super bien.
Julien : j’écoute beaucoup Metric même si je suis déçu par leur dernier disque. Et Blonde Redhead aussi Il y a ce même lien avec Gainsbourg. Mais quelqu’un qui est hyper fan de Blonde Redhead et qui écoute ce disque dans l’espoir de retrouver la même chose va être déçu !
Juliette : je me suis prise une claque avec la sortie d’Antony & the Johnsons, je trouve ça absolument incroyable. Sinon, un autre truc que j’adore, c’est The Last Town Chorus, ils ne sont pas très connus. Je les ai vu en concert et j’ai été mesmérizée.
Vous préparez un deuxième album ?
Rémy : on est surtout en promo et en tournée. Comme le disque passe de maison de disques en maisons de disques depuis pas mal de temps, on a continué à composer à ce moment-là.
Julien : on avait pas fait ça pour faire un disque, donc ça ne nous a pas arrêté, que ça sorte ou non. On a fait 3, 4 nouvelles chansons, il y en a même 2 qu’on joue en live. Les 2 nouvelles chansons passent super bien.
Rémy : Notre disque sort au Japon et la maison de disque a voulu qu’on fasse un duo avec Coralie Clément. Donc, on a fini un morceau il y a à peine 15 jours pour qu’il figure dans les bonus du disque.
Vous deux, Rémy et Julien, vous avez des projets parallèles ?
Julien : notre métier à nous, c’est de faire des disques. Effectivement, on bosse en prod ou en pré-prod avec n’importe qui qui nous demande de la pop un peu sophistiquée et orchestrée.
Rémy : en ce moment, on travaille pour Dorval qui est une artiste signée sur le même label que nous. Elle nous a demandé de réaliser son album qui sort en avril. On a aussi un autre projet qui sortira à la rentrée. Ça va nous prendre pas mal de temps, on est assez occupés.
Avec qui aimeriez-vous collaborer ?
Rémy : j’aimerais bien rencontrer les gens de Phoenix On aime bien leurs sons. Sinon, j’aimerais bien aussi rencontrer celui qui a réalisé l’album Wallpaper for the soul de Tahiti 80, Andy Chase. J’aimerais bien au moins le rencontrer, pour partager des choses avec lui.
Juliette : j’aimerais bien me faire inviter par d’autres gars ou d’autres filles pour chanter, même des trucs hyper différents, pas forcément de la pop.
Rémy : on n’est pas un groupe fusionnel. C’est comme ça que le projet peut mûrir et partir ailleurs. Si Juliette chante sur un autre album, ça peut aussi faire vivre Diving.
Juliette : on s’aime beaucoup, on aime bien se voir, mais on est super différents.
Julien : le son particulier qu’on possède vient de là, du fait qu’on soit différents. On l’était encore plus au départ. Et moi, sinon, j’adorerais travailler avec PJ Harvey, réaliser son disque !
Le nom du groupe vient d’un malentendu, non ?!
Juliette : un soir, on cherchait un nom. Je lisais un recueil de Paul Auster avec une histoire de déjeuner oublié?
Rémy : c’est un mec qui propose à son meilleur copain de l’emmener à l’école à mobylette.
Juliette : et donc, il partent à l’école, son pote lui dit qu’il a oublié sa « lunch-box». Le pote se repointe chez la mère, s’arrête chez son pote et mange le sandwich. La nouvelle s’appelle « Driving With Andy », et moi, au téléphone, j’ai dit Diving With Andy (diminutif d’Andrew, comme la chanson) sans faire exprès. C’est plus poétique en fait. Mais apparemment, les gens aiment bien ce nom !
Avec l’aimable autorisation de Dièse Production
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