Chargée de répartir les fréquences des radios, l’autorité de régulation de l’audiovisuel est accusée de mener une politique très favorable aux grands groupes. Indépendants et associatifs se rebiffent.
En France, les ondes hertziennes sont devenues folles. Entre errements des politiques, volte-face du CSA et appétits inavouables de certaines stations, le paysage radiophonique apparaît presque indéchiffrable, comme si des champs de force antagonistes brouillaient sa bonne lecture. Le dossier de la Radio numérique terrestre (RNT), cet inextricable méli-mélo d’enjeux financiers, a exacerbé les divergences entre les différentes catégories de radios. Groupes privés, service public, radios indépendantes et associatives, tous parlent en même temps, personne ne s’écoute. Chargé à la fois de gérer le présent analogique et d’ouvrir la voie aux nouvelles technologies, le CSA subit la pression des uns et irrite les autres. Jamais aussi contesté que sous l’ère Sarkozy, il a même vu son existence remise en cause. Son nouveau président Olivier Schrameck se sait attendu sur les terrains où on a vu patiner son prédécesseur, Michel Boyon. Parmi les plus glissants : la concentration des médias, un sujet finalement assez peu débattu en France.
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Les quatre grands groupes privés (NRJ Group, Lagardère, RTL Group, Nextradio TV) sont pointés du doigt pour, entre autres, bloquer le processus de la RNT, ce qui les dispenserait de partager le gâteau publicitaire avec de nouveaux entrants. On leur reproche aussi de s’être fait attribuer un nombre disproportionné de fréquences hertziennes par le CSA à l’époque du président Boyon, profitant ainsi de leur puissance pour concurrencer sur leur terrain les radios indépendantes.
C’est du moins l’avis du Syndicat interprofessionnel des radios et télévisions indépendantes (Sirti), une des voix les plus offensives du milieu. “Nous avons vécu ces dernières années une politique massive et délibérée de renforcement des principaux groupes”, annonce Philipe Gault, président d’un syndicat regroupant 151 radios et télés indés vivant de leurs seules ressources publicitaires. “Il n’y a pas eu de régulation. Nous demandons que le plafond de concentration en radio analogique, limitant à 150 millions d’habitants la population desservie par un même groupe, soit abaissé à 120, garantie d’une meilleure diversité.”
Selon le syndicat, sur plus de 1 600 fréquences attribuées entre 2005 et 2012, près de 750 ont échu aux quatre groupes précités ainsi qu’une centaine au seul Skyrock. Dans le même temps, les 140 radios adhérentes du Sirti en obtenaient 366, d’autres indépendantes moins de 100, les associatives 300. NRJ, Lagardère (Europe 1), RTL Group et Nextradio TV ont investi simultanément le secteur télévisuel, possédant 8 chaînes sur 17 de la TNT gratuite nationale.
Pour Mathieu Quétel, vice-président du Sirti, la coupe est pleine. “Ces chaînes de radio/télé irriguent notre territoire avec des moyens marketing énormes, martelant leur logo à longueur de journée. Nos radios vont perdre de l’audience, être impactées sur vingt ans. On cherche à détricoter notre secteur.” La prochaine loi sur l’audiovisuel, prévue courant 2013, ne devrait a priori rien changer à la donne.
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