L’ancien leader de The Servant se lance enfin en solo : rusée et mélodique, son electro-pop est un piège à coeurs.
Son groupe, The Servant, avait beau alors être totalement inconnu, présentant en avant-première ses chansons dans un bar en marge des Trans Musicales, on avait vu une star dans la nuit rennaise. Dan Black possédait déjà une telle autorité sur le maigre public, une telle aura qu’il brillait de l’intérieur. Avec The Servant, sa gouaille éraillée, son dandysme amoché, ses observations obliques trouvaient parfois l’écrin – en satin noir, déchiré, élimé – digne de leur rang. Mais on sortait frustré de ces chansons où les compromis imposaient la raison, où la démocratie arrondissait des angles aigus, cagneux, qui auraient dû lacérer plus souvent une pop trop ronde et rutilante.
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Car c’est à hauteur d’homme anglais, des mêmes trottoirs et fenêtres embuées d’où venaient, en leur temps, les chansons les plus malsaines et haletantes des Streets ou de Pulp, que parle Dan Black. Pop de terrain, en direct de l’évier de la cuisine, comme ces kitchen-sink dramas qui firent la grandeur de l’Angleterre littéraire des années 50 et 6O. L’évier de Dan Black a beau être plaqué or, éclairé par une boule à facettes, c’est bien la même eau de vaisselle, souillée, qui coule dans ses tuyaux. Et c’est tout le trouble de cette musique, à la fois utopiste et réaliste, euphorique et cafardeuse, chimérique et journalistique, malingre et grandiloquente, très dansante et patraque, à l’image d’un Symphonies qui rêve de hauteur, de grandeur avec son moral tout en bas des chaussettes.
Carrefour de sons qui s’entrechoquent, venus de tous les horizons (hip-hop, eighties, electro, pop…), sans qu’un gardien de la paix n’intervienne, Un semble tout ignorer des exercices de style, de l’ironie postmoderne. Tous ces sons, principalement electro, toutes ces ambiances contradictoires sont inscrites à même l’ADN de Dan Black, qui se contente de laisser cavaler en lecture aléatoire un iPod interne où le seul critère de sélection semble être la mélodie – qu’importe son nom de famille. Il la traite avec amour, respect et vice.
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