Paru en 1994, Wowee Zowee, troisième album des américains de Pavement, a aujourd’hui droit à une belle réédition agrémentée de nombreux inédits. L’occasion de revenir sur cet album hirsute et déglingué, l’un de tous meilleurs de ce groupe, avec deux clips en vidéo et deux titres inédits en écoute.
Lorsqu’il publie en 1994 son troisième album, le détraqué Wowee Zowee, Pavement est plus ou moins le porte-drapeau de l’underground américain. Après Slanted & Enchanted, manifeste bruitiste et désinhibant, et le plus propret Crooked Rain Crooked Rain, gorgé de tubes malins, ce troisième album va prendre tout le monde à revers. Hirsute et éclaté, il brise la belle ligne droite qui aurait amené ces californiens aux plus hautes marches du hit parade.
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En dix-huit titres, Wowee Zowee fait le tour de la question et montre les possibilités inouïes ? comme les limites ? du style « Pavement ». Un style musical que des journalistes en manque d’idées ont lâchement résumé en un terme, « slacker » (fainéant), qu’ils avaient déjà affublé à un autre californien tout aussi malin, Beck.
Pourtant Pavement est tout sauf un groupe fainéant. Si on ne comprend toujours pas aujourd’hui comment ces joyeux drilles faisaient leur petite cuisine en interne, le menu était frugal et les ingrédients parfois des plus incongrus. Stephen Malkmus et ses acolytes s’amusent ici avec leurs instruments (ça s’entend), démontent leurs morceaux avec une joie infantile, brisant rythmes et mélodies pour mieux perdre l’auditeur.
Ne cherchez pas de tube sur Wowee Zowee, les morceaux cherchent trop à sortir des sentiers battus pour penser à un quelconque calibrage. Les splendeurs les plus épicées ne manquent pourtant pas : Grave architecture qui commence sur un ton espiègle pour mieux péter un câble à mi-parcours et se transformer en aventureuse dérive où les guitares savantes de Malkmus et Scott Kannberg se cherchent des pous ; Fight this generation et ses violoncelles malsains qui aboutissent à une joute hypnotisante entre krautrock et noisy pop ; l’introductif We dance, valse claudicante à la mélancolie tenace, portée par un piano désaccordée Ecouter cet album d’une traite est à coup sûr un bon moyen de s’y perdre dans ses connaissances musicales.
Comme ses prédécesseurs, Wowee Zowee a désormais droit à sa luxueuse réédition : deux CDs qui, outre l’album original, présentent une cohorte invraisemblable de titres rares, de démos, de live inédits et autres sucreries pour le dessert. Joint par mail à l’occasion de cette belle sortie, Bob Nastanovich, le multi-instrumentiste du groupe devenu depuis agent de jockey dans le monde hippique (!!), reconnaît l’importance de Wowee Zowee dans la carrière du groupe : « J’aime vraiment beaucoup cet album car il y a quelques unes de mes chansons préférés de Pavement dessus. A l’époque, nous étions enfin devenus un vrai groupe sur scène et au maximum de notre créativité en studio. C’est pour tout les membres du groupe un album charnière« .
Après ce monument dressé à la démesure créatrice du groupe, Pavement est plus ou moins rentré dans le rang. Ses deux derniers albums, Brighten the corners et Terror Twilight, tout en frisant l’excellence, n’atteindront pas la puissance de ce troisième album. Alors que l’on murmure un peu partout, sur des blogs avisés comme sur des médias plus classiques, que Pavement serait sur le point de se reformer, l’ami Bob, lui, est plus nuancé : « Ce n’est pas impossible. Je crois que la discussion a été entamée mais je n’ai pas été mis au courant« . 2007, année Pavement ?
Pour vous faire (re)découvrir Wowee Zowee, lesinrocks.com vous propose de regarder les deux clips réalisés à l’époque pour cet album, Rattled by the rush et Father s to a sister thought.
Avec l’aimable autorisation de PIAS
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