Certaines personnes râlent à cause des setlists évolutives de Radiohead. Il s’agit pourtant de l’un des précieux gages de la liberté du groupe de Thom Yorke. Récit de l’incroyable temps fort de notre deuxième soir à Primavera.
Si jeudi soir, le site du festival Primavera n’était en aucun cas encombré, ce fut une tout autre histoire le vendredi. Une foule venue de tous horizons, dont une bonne partie porte un t-shirt estampillé du nom du fameux groupe, se presse déjà vers la grande scène, deux heures avant le début du concert. Ce soir, Radiohead remonte sur scène après quatre ans d’absence. 22h15, une page de l’histoire de Primavera commence à s’écrire.
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Tout le monde a déjà été confronté à Radiohead une fois dans sa vie. Que ce soit à travers la bande originale d’un film, au hasard d’une playlist ou bien via la guitare d’un amour de vacances qui joue Creep sur la plage (et Wonderwall, aussi). Un groupe aussi difficile à cerner tant ils ont exploré des styles différents aux faux airs accessibles. De l’initié au fan absolu, le concert d’hier soir a su faire chanter chaque personne de la foule car il n’est clairement pas nécessaire de vénérer la bande à Thom Yorke pour entonner le refrain de No Surprises.
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Le concert débute, le groupe entre en scène mais les écrans géants ne s’allument pas. Il faut savoir que si Radiohead a fait une pause de quatre ans, son chanteur Thom Yorke lui, n’a pas chômé et s’est investi dans un nouveau groupe, Atoms For Peace, puis dans un projet solo. A chacune de ses apparitions, les écrans ne diffusaient ni images frontales, ni gros plans : seulement une succession de plans saccadés bardés d’effets. Très agréable visuellement, mais compliqué pour le public s’il se trouve au delà du quatrième rang. Hier soir, même rengaine : soit, nous profiterons davantage de la musique.
Un tonnerre d’applaudissements plus tard, les Anglais débutent leur concert calmement, par cinq morceaux tirés de leur nouvel album sorti le mois dernier (Burn The Witch, Daydreaming, Decks Dark, Desert Island Disk et Ful Stop). Même s’il n’y a rien à dire sur la qualité de l’interprétation ou même sur la voix inchangée de Thom Yorke, il est un peu compliqué de rentrer directement dans le concert. Planant, atmosphérique et ambiant. En totale adéquation avec une foule sage, calme et avide de bon vieux tubes. Aussitôt souhaité, aussitôt réalisé : Radiohead joue les premières notes de The National Anthem, Lotus Flower puis No Surprises. Les yeux deviennent flous, les téléphones passent en mode vidéo et la foule devient folle d’admiration.
Quatre ans, c’est le temps qu’il aura fallu au groupe pour mettre de côté les side-projects, mais aussi le temps nécessaire pour qu’un public venu du monde entier soit au service d’un seul groupe. Exemple marquant lorsque Radiohead achève une magnifique version live du cultissime Karma Police, mais que la foule en décide autrement puisqu’elle continuera pendant quelques minutes à réciter le refrain en choeur, faisant du site de Primavera une véritable chorale géante. Quelques Idiotheque et Street Spirit plus tard, le groupe tire une première fois sa révérence puis revient notamment interpréter Paranoïd Android, 2+2 = 5 et fait de nouveaux au revoirs sur There There, mais ne semble toujours pas quitter la scène définitivement.
C’est alors que Thom Yorke saisit le micro, chuchote quelques « If, if you, only if you’re good » (« seulement si vous êtes sages »). Le public est perplexe, la setlist communiquée au préalable (et, on le découvrira plus tard, les setlists présentes sur scène pour les musiciens aussi) ne comportent pas de morceau supplémentaire. Les lumières s’éteignent et le premier accord de Creep retentit. Moment d’anthologie, Thom Yorke s’avance vers le public et entame l’un des plus grands morceaux de l’histoire du rock. Phénoménal.
Côté Twitter, c’est la déferlante. Radiohead est en TT France, et le public du festival les Nuits de Fourvières ayant accueilli le groupe deux jours auparavant crie au scandale, car Creep n’a pas été interprété lors du concert précédent. Alors qu’il est tellement agréable de se faire surprendre par un groupe dont la setlist n’est pas figée, et dont les choix ne dépendent pas de la demande du public mais bien des membres eux-mêmes et de leur ressenti du moment. Car si l’on s’attendait à quelque chose de magistral, nos attentes ont été hier soir, largement magnifiées.
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